samedi 1 décembre 2018

Nanowrimo Novembre 2018

Objectif 50 000 mots
Total  50 274 mots
Validation 26 novembre 2018
Objectifs atteints oui
Ecarts 115 (après validation)-2 955 mots dans la journée

jeudi 18 octobre 2018

Xochilmilco


 Abandonnée sur un trottoir par une petite fille devenue trop âgée, la poupée se sent seule. Elle se souvient des jeux d'autrefois dans la grande maison pleine de rires et de jeux. Elle se souvient aussi d'une émission de télévision qu'elle avait regardée dans les bras de la petite fille il y a bien longtemps, elle traitait d'un refuge pour ses compagnes solitaires.
  Mais comment se rendre là-bas ? Une poupée n'a pas d'argent, une poupée n'a pas de jambes. Les larmes aux yeux qui ne peuvent quitter ses iris de verre bleu glacier, elle regarde le ciel et elle implore ce Dieu chez qui sa petite fille l'emmenait prier tous les dimanche. Elle attend longtemps, des jours, sous le soleil et sous la pluie. Mais rien ne vient.
- Oui, je suis en avance, j'ai le temps de flâner. Je te rappelle quand je suis là-bas.
Le jeune homme s'arrête devant la poupée défraîchie par le temps et les intempéries.
- Allez, viens je t'emmène en balade avec moi.
La poupée ne sait rien de lui, rien de son projet mais elle n'a pas d'autre choix que de le suivre. La poupée sait que nul ne voudra d'elle, un de ses yeux de verre est cassé, des mèches de ses cheveux sont arrachées, ses habits autrefois d'un blanc immaculé sont tachés et déchirés. Alors, elle suit le jeune garçon avec confiance. Elle est mise dans son sac et elle l'entend courir et monter dans une voiture. Puis elle entend des bruits et elle sent le sac rouler et vibrer. Elle reconnaît des bruits d'avion et elle reste longtemps dans le noir, dans le froid de la soute de l'avion qui l'emmène vers une destination inconnue.
Elle reste des jours dans le sac dans ce qu'elle suppose être un hôtel et enfin, un matin, il monte avec elle dans un bateau et il l'emmène dans une petite île, serrée contre son cœur battant. Là, des compagnes d'infortune vieillies par les embruns et par le soleil lui murmurent :
- Viens avec nous, si tu n'as plus personne qui joue avec toi, reste avec nous, c'est mieux que de finir dans une poubelle ou dans une décharge ou incinérée. Nous parlons, rions, racontons des blagues et chantons quand il n'y pas âme humaine qui vive sur l'île.
Rassurée, la poupée laisse le jeune homme la pendre à un arbre.
- J'ai fait une promesse à ma petite sœur qui a vu un reportage sur cette île mais elle nous a quittés et j'ai perdu sa poupée presque neuve dans les transports en commun alors que j'étais en route pour l'aéroport. J'espère que sa poupée trouvera une bonne petite fille. Grâce à toi, je remplis ma promesse et tu ne finis pas à la décharge municipale. Merci, je reviendrai un jour, je te le promets.
Et elle laisse le jeune garçon s'éloigner sans un regard ; elle écoute les murmures de ses compagnes d'infortune s'animer au fur et à mesure qu'il s'éloigne. La poupée espère que le jeune garçon reviendra le voir un jour et elle est heureuse de ne pas finir incinérée et d'avoir quelqu'un à attendre.

jeudi 6 septembre 2018

Diplomatie de haut vol


Caché dans la haie où il a dormi cette nuit, il écoute les conversations qui lui parviennent portées par le vent.
- Oui, elle est venue au travail avec des cheveux violets, je ne vous dis pas comme nous avons ri en la voyant. s'esclaffe la voix haut perchée d'une femme en robe rouge chic qui s'harmonisent avec ses cheveux roux un verre de cocktail à la main.

Dans un transat avec ses deux amies, Laure ressert une tournée de punch avant de poursuivre
- Déjà qu'elle aime les robes aux couleurs voyantes d'un goût douteux, je vous laisse imaginer les cheveux violets et la robe jaune poussin. Et face aux clients, ça ne fait pas sérieux. Non, mais en vrai, vous prendriez une assurance auprès d'une femme habillée comme un clown ?
- Tu m'étonnes ! entame une autre voix. Ma voisine a un nouveau petit ami. Le troisième en trois mois. Elle n'arrive pas à se fixer.
- Ou elle a problème et elle n'arrive pas à trouver le bon ou elle ne sait pas ce qu'elle veut. Elle est belle, un peu trop intelligente mais à part ça, elle a tout pour plaire. Peut-être un peu trop d'ailleurs. répond Laure. Et toi, Jeanne, tu ne dis rien.
La brune aux cheveux frisés se lance dans le récit des dernières bêtises de ses enfants en concluant que décidément, ils sont vraiment aussi empotés l'un que l'autre.
Longtemps, il reste à les écouter échanger des potins et se moquer. Puis lorsque le jardin désert devient un refuge silencieux pour dormir, il laisse le sommeil l'envahir enfin.
Il fait encore nuit lorsqu'il reprend sa route sans savoir où aller. Depuis une semaine que son vaisseau spatial a sombré dans la mer, il sillonne la région, marchant la nuit et dormant en lieu sûr durant le jour. Il a eu le temps d'observer les humains dont il a appris la langue principale, l'anglais avant sa mission de reconnaissance.
Le diplomate lève les yeux vers le ciel, il sait que son système permettra à ses compatriotes de le retrouver. D'ici un mois, ils seront là, prêts à le récupérer. Mais il devra leur dire la vérité sur ses conclusions, les humains ne sont pas ouverts et humains entre eux. Une tentative de coopération avec cette population lui semble voué à l'échec.

jeudi 9 août 2018

Le wendigo


La créature qui n'a que la peau sur les os, desséchée et tendue comme un fin parchemin qui souligne ses yeux enfoncés très profondément dans leurs orbites. Ses lèvres en lambeaux ne sont que sang et pourriture étirées en un rictus dégoûtant et froid comme la mort.
Sa dernière victime, un enfant qui faisait l'école buissonnière, tire la peau de son ventre distendu par ses repas précédents lui donnant l'air d'un canard qui se dandine. Déjà en quête d'une nouvelle proie, il écoute les bruits alentour. Et elle est là, un scout qui campait avec sa troupe qui s'est mis à l'écart pour un besoin nature.
Le cannibale puni pour sa faute expie depuis des siècles le péché qui l'a mené à sa perte. Il a dépecé son meilleur ami après une partie de pêche pour se faire une idée du goût de la chair humaine. Puis le cri du wendigo l'a appelé du plus profond de son être alors qu'il se promenait dans la forêt en pleine nuit. Sa faim dévorante n'est jamais rassasiée et elle lui tord les entrailles. Insatiable, l'envie de croquer dans les mollets tendres des enfants qui partent à l'école dès l'aube lui met la bave à la bouche, une bave mêlée de sang. Une vague de violence l'envahit et il sent ses muscles se raidir, prêts à bondir sur leur proie.

lundi 6 août 2018

La dernière sirène V1

La sirène frissonne dans l'air du soir, elle enroule ses longs cheveux d'or autour d'elle pour se réchauffer oubliant qu'ils sont aussi mouillés que sa peau. Elle lève les yeux vers le ciel et elle regarde au loin la lune qui éclaire la scène d'un éclat fantomatique.
Puis elle se met à chanter et sa voix cristalline emplit l'air que le vent emporte aussitôt au loin. Nul bateau à l'horizon, elle est seule sans compagnon en ce soir d'hiver. Elle ressent à peine le froid mais peu à peu, malgré sa solide constitution adaptée aux températures hivernales en haute mer, il s'immisce en elle. Ce n'est pas tant le froid de l'extérieur qui la glace mais le froid de son cœur qui se meurt de solitude et de tristesse.
- Je suis la dernière sirène, je ne sais où sont mes compagnons qui ont fui ma plage bien-aimée, j'ignore s'ils sont en vie et s'ils voguent sur d'autres flots. Seule, sans amour, sans chants, sans rires et sans jeux, je me languis de vivre et parfois je songe à cesser de lutter. Si les hommes me découvraient qu'adviendrait-il de moi ? Me laisseraient-ils vivre à proximité de leur communauté, me chasseraient-ils ou me feraient-ils prisonnière ? Je ne sais et je ne parviens à me décider alors je chante sous la lune et sur les flots.
Un soir d'été, un jeune pêcheur titube légèrement sur la plage, les mains dans les poches. Soudain, un chant atteint son oreille et il cherche du regard d'où il provient. Il sait qu'il a trop bu mais il sait également qu'il n'a pas rêvé et que l'air frais qu'il cherchait en se rendant sur le rivage a commencé à remplir son office.
- J'ai bu trop de cidre à la taverne. se dit-il.
Pourtant, il cherche la chanteuse dans le noir mais il ne distingue rien dans la pâle lumière lunaire. Le chant s'est tu et il abandonne sa recherche, certain d'avoir rêvé ou entendu le bruit du vent. Mais de nouveau, le chant s'élève et il s'approche du rivage pour se passer le visage à l'eau dans l'espoir d'avoir les idées plus claires. Il tend l'oreille et il est certain de bien avoir entendu un chant de femme non loin de lui apporté par la brise légère. Il ôte ses chaussures et il marche dans l'eau dans la direction de la voix qui vient de la mer, il en est sûr. Un bateau ? Ou une baigneuse nocturne ? Puis il la voit. Une frêle jeune fille aux longs cheveux blonds chante dans l'eau à demi-nue, ignorant qu'un indiscret l'observe. La lumière donne à sa peau de porcelaine un aspect fantomatique et fragile qui rehausse sa beauté naturelle. Le jeune homme sourit, l'amour vient d'envahir son cœur qui se met à battre un peu plus vite. Il hésite un moment, craignant de faire fuir l'apparition. Mais sans réfléchir, il lance ses chaussures au loin et il remonte son pantalon pour s'avancer dans l'eau en silence.
A son approche, la jeune fille tourne la tête vers lui et il lui sourit, craignant de la faire fuir.
- Pardon, je vous ai entendu chanter et je vous ai vue. Je ne voulais pas vous importuner.
Il détaille la jolie demoiselle qui lui fait face et il ne peut ignorer sa poitrine découverte qui le met mal à l'aise ; il détourne le regard et il rougit dans l'obscurité.
- Je ne voulais pas vous déranger, je vous souhaite une bonne nuit.
Il s'éloigne, craignant de la déranger mais il se retourne pour lui crier :
- Vous chantez divinement bien, j'espère vous entendre de nouveau chanter. Je vous souhaite une bonne baignade au clair de lune.
La jeune fille ne répond pas et il s'éloigne en se retournant plusieurs fois. Le lendemain soir, après une journée passée en mer, il revient sur la plage guettant la jeune fille de la veille. Et elle est là, chantonnant dans la mer le dos tourné à la plage, une fois la nuit tombée. Sans réfléchir, il se glisse dans l'eau à moitié habillé pour la rejoindre et elle se retourne en l'entendant plonger.
- Bonjour, je vous demande pardon, il n'est guère poli de me rapprocher ainsi de vous mais je vous ai trouvé si sereine que je n'ai pas voulu vous troubler. Je m'appelle Morgan et vous ?
- Océane. dit-elle avec un sourire.
- Et où vivez-vous ?
- Ici...
- Je ne vous ai jamais vue au village. Je dois y aller, je suis passé en rentrant de mon travail mais je ne puis m'attarder, je me lève tôt demain pour aller pêcher avec mon cousin. Venez au fest-noz demain soir, je vous y attendrai.
- Je serai là. répond la sirène en le regardant s'éloigner.
Puis elle lève les yeux vers la lune et elle se remet à chanter, elle sait qu'elle vient de tomber amoureuse mais elle ne sait pas comment elle se rendra à cette fête.
  Le lendemain matin, cachée derrière un rocher, elle guette le jeune homme et son cousin qui montent dans un petit bateau de pêche au petit matin alors qu'il fait encore frais en ce jour d'été. Le vent lui amène leurs rires et elle entend l'homme raconter sa rencontre de la veille avec une jeune fille blonde à la voix d'ange qu'il espère voir le soir au fest-noz et qu'il compte bien faire danser toute la nuit. La sirène les observe un long moment de loin puis elle suit le bateau à distance sous l'eau.
  Le soir venu, la jeune sirène solitaire tente de se représenter la fête qui se déroule sans elle et elle imagine Morgan danser au bras d'autres jeunes filles, des filles humaines avec des jambes pour danser et marcher. La jalousie lui tord le cœur et ses larmes se mêlent à l'eau de la mer tandis que son chant déchirant emplit la nuit. Elle sait qu'elle doit lui dire la vérité et que de toutes manières, son secret ne tiendra pas longtemps. Il ne vient pas le lendemain ni le surlendemain et Océane sait qu'elle ne le reverra sans doute jamais et que c'est mieux ainsi ; pourtant elle a du mal à quitter la petite plage où personne ne vient jamais. Le troisième jour, la sirène chantonne à moitié allongée sur un rocher sortant de l'eau en pente douce qu'elle affectionne. 
- Vous êtes là, je vous ai attendue l'autre jour.
Surprise, son premier mouvement est la fuite puis elle se dit qu'il vaut mieux en finir et lui avouer la vérité surtout qu'il a pris la peine de nager jusqu'à elle. Elle lève ses grands yeux bleu foncé vers lui qui se noient de larmes. Après un moment d'hésitation, le jeune homme se hisse vers elle sur le rocher en lui disant qu'il ne voulait pas l'offenser.
- Je ne pouvais pas venir mais j'aurais aimé venir.
- Pourquoi donc ? dit-il en l'observant attentivement et en s'accoudant plus confortablement sur le rocher face à elle.
La jeune fille ne répond rien et elle tremble. Le pêcheur croit qu'elle tremble de froid et il lui propose de rejoindre la plage où le soleil les réchauffera. Il a ramené une couverture pour s'asseoir sur le sable et elle pourra s'en envelopper.
- Je ne peux pas. répond la jeune fille en regardant la main qu'il lui tend tandis que le sourire du pêcheur s'efface.
- Pourquoi donc ? Je vous ai attendue hier et vous n'êtes pas venue, êtes-vous en train de vous moquer de moi ? 
Il sent qu'elle s'apprête à fuir et il prend son fin poignet dans sa main et elle se débat en vain. La colère se mue en incompréhension et il attend sa réponse.
- Si ma compagnie vous dérange, dites-le moi et je rejoindrai la plage. murmure-t'il, inquiet à l'idée de l'avoir offensé. 
- Non, je suis désolée, je ne pouvais pas venir même si j'aurais aimé me rendre à cette fête. Je suis si seule. dit-elle alors que sa voix se brise.
- Avec moi, vous n'êtes plus seule. dit le pêcheur d'une voix douce en l'attirant dans ses bras sans lui laisser le temps de protester.
  La jeune fille se laisse aller à ce contact, elle qui est seule depuis des années lorsque tous ceux de son espèce qui vivaient sur ces rivages les ont quitté quand les hommes ont commencé à s'installer dans les parages. Elle seule n'a pas eu la force de quitter son foyer tant aimé, elle aurait pu retrouver ceux auprès de qui elle a grandi mais sans famille, personne n'a pensé à lui dire où les retrouver si elle changeait d'avis. Depuis deux ans, elle chante dans la nuit en espérant que quelqu'un l'entende et maintenant que c'est arrivé, elle a peur et elle regrette que son vœu se soit réalisé. Elle sent le jeune humain se raidir lorsque sa queue de poisson frôle ses jambes et instinctivement, il baisse les yeux dans l'eau pour tenter de distinguer ce qui l'a effleuré et elle se met à trembler. Dans la lumière déclinante, le pêcheur a entrevu la queue de poisson qu'elle avait tenté de lui dissimuler et il comprend mieux son absence à la fête une fois la surprise passée.
- Je croyais que les morganez n'étaient que des légendes.
- Alors que vous portez notre nom. lui répond Océane avec un sourire triste. Me tuerez-vous ? demande-t'elle, inquiète.
- Non, bien sûr que non. Viendriez-vous vivre avec moi, si c'est possible...
- Je suis la dernière sirène de la région, je ne puis partir.
- Mais si vous restez la seule sirène, qu'adviendra-t'il dans le futur ?
- Il n'y aura plus de sirène dans la baie. murmure Océane dans un murmure. Tout mon peuple est parti au loin en un lieu que j'ignore pour fuir les hommes.
- Mais pourquoi ? Personne vient jamais par ici, on dit les grottes hantées. Si je n'avais pas bu l'autre soir, je ne serai jamais passé par là. On dit qu'on entend des voix chanter la nuit.
- Nos chants ? Nous avons failli être découverts par un naufrageur qui examinait la plage pour savoir s'il pourrait l'utiliser à son profit, ce qui n'est pas le cas, elle est petite et il n'y pas de bas fonds. Il était lourdement armé et nous avons pris conscience du danger, maintenant que les hommes s'aventurent sur cette plage qui est notre refuge depuis des décennies.
- Nos deux espèces ont peur l'une de l'autre semble-t'il. Mais cela ne change rien au fait que vous voilà seule.
A ces mots, la sirène fond en larmes ce qui émeut le pêcheur jusqu'au fond de son âme. Il reprend d'une voix douce en lui tendant la main.
- Il y a un sorcier qui vit dans le Menez-Bré, un ermite que j'irai voir, il est réputé très puissant. Je partirai demain et je reviendrai dès que possible, je vous le promet Océane. M'attendrez-vous ?
La jeune sirène acquiesce un peu inquiète à l'idée qu'il revienne avec des amis pêcheurs pour la capturer. Ils parlent longuement cette nuit-là et au matin, la sirène regarde le jeune homme s'éloigner certaine de ne jamais le revoir.
  Morgan marche durant des jours, voyant dans son prénom un signe du destin et du rôle qu'il a à jouer. Sans famille, il n'a rien à perdre à tenter sa chance et la jolie sirène l'a atteint au plus profond de son âme lui qui dédaigne les filles qu'il connaît depuis toujours en sachant bien que sa future compagne n'est pas parmi elles. Enfin, il va trouver l'ermite du Menez-Bré et il lui expose son cas et son idée. Puis il repart aussitôt qu'il a obtenu ce qu'il voulait, un flacon à la main. Gwenc'hlan a écouté sa requête et l'un des derniers druides de Bretagne a mis tout son talent dans sa potion, refusant d'être payé pour ses services autrement qu'en renseignements sur la créature que le jeune homme lui expose une nuit durant autour d'une marmite de soupe épaisse et nourrissante.
  Arrivé de nuit, le pêcheur se rend dans sa petite cabane solitaire dont il fait rapidement le tour. Il ne veut rien emporter et il sait que personne ne s’inquiétera de son absence. Alors, il se rend sur le rivage où la sirène lance au vent une chanson mélancolique dont il ne comprend pas bien les paroles mais qui parle de solitude et d'amours perdus.
- Je suis revenu ! Océane, tu m'entends ? la hèle-t'il face à son manque de réaction.
La jeune fille se retourne et la surprise envahit son visage à sa vue. Inquiète, elle observe les alentours mais elle n'entend que le bruit de la mer, il ne semble pas être venu avec des renforts dans le but de la capturer. Il est entré dans l'eau et déjà, il la serre dans ses bras en l'embrassant longuement.
- Je ne te quitterai plus jamais. dit-il avant de boire, craignant de perdre son courage.
Puis comme le sorcier le lui a recommandé, il tend la fiole à la jeune fille qui craint qu'il n'ai ramené un poison mais lorsqu'elle voit ses jambes se changer en queue de poisson, elle boit à son tour. 
- Désormais nous pourrons choisir de vivre sur terre ou dans la mer avec des jambes ou une queue de poisson selon notre envie du moment. Ainsi que tous nos descendants et leurs descendants qui transmettront ce pouvoir à tous leurs descendants pour l'éternité, le grand sorcier que je suis allé voir me l'a assuré. dit-il en serrant Océane contre lui, le cœur battant. S'ils le veulent, la mer se repeuplera sur ces côtes.
  La sirène met du temps à comprendre ce qu'il lui dit et elle rit sous la lune avant de l'entraîner dans la mer main dans la main pour lui faire découvrir son royaume en rêvant à une mer repeuplée dans un futur lointain si leurs enfants choisissent la mer et non la terre. Et si le vent murmure aux sirènes exilées au loin que cette partie du rivage se repeuple.

mercredi 1 août 2018

Nanowrimo Juillet 2018

Objectif 50 000 mots
Total 50 375 mots
Validation 28 juillet
Objectifs atteints
Ecarts : 3 654- 0

Bilan:
deux week-ends où je n'étais pas chez moi, un travail avec des horaires larges, ce fut difficile.

jeudi 19 juillet 2018

Mevel an noz

Abaoe dek vloazh, Ancelin boe mevel an dug Bertold. Ar paotr yaouank labouras bep noz evit e mestr da gas lizheroù kevrinek o mont da festoù evel an spier. Ne blij ket dezhañ e vicher met paeet mat a boe. E-pad an deizh, Ancelin kouskas ha ne boe ket amzer evit spletiñ e vuhez. Un noz gant an dug eas d'ar c'hastell dug Oldaric a zo amezeg o chom e-kichen o c'hastell. Ancelin boe skuizh rak e c'hambr oa yen e-pad ar goañv-se. Ar paotr hunas hag an daou dug komzjont e kichen d'ar mevel met ar mevel selaouas o c'homzad. An tudjentil divizjont drouk-lazhañ an roue rak sonjont ar prins ao sot hag a bezañ o c'huzulieren.
Pa an holl c'hastel boe kousket, an mevel laeras an marc'h hag eas da Pariz. Pemp deiz goude, Ancelin arruas ar c'hastel roue hag lavaras dezhañ an irienn. Ar roue gasas div spieren d'ar dugoù evit skoazell anezho da drouk-lazhañ an roue ; lavarjont dezho an servijer selaouas o komz ha gasas un lizher dezho.
Pa an daou tudjentil anzavjont an gwirionez, an spieroù profjont un voutailhad gwin evit lidañ ar mevel d'ar roue. Met ar spierjen ne vevjont ket ar gwin a zo kontamminet. An daou dug varvjas hag an daou spier eas d'ar c'hastell roue evit gontañ ar gwirionez. Ar mevel, Ancelin, a voe graet marc'heg anezhañ.
xXxXx
Depuis dix ans, Ancelin était valet du duc Bertold. Le jeune homme travaillait chaque nuit pour son maître à envoyer des lettres secrètes ou aller à des fêtes comme espion. Il n'aime pas son métier mais il est bien payé. Durant le jour, Ancelin dormait et il n'a pas le temps de profiter de la vie. Une nuit, il accompagne le duc au château du duc Oldaric qui est un voisin qui vit dans un château proche. Ancelin était fatigué car sa chambre est froide durant cet hiver-là. Le garçon dort et les deux ducs parlent près du valet mais le valet entend leur conversation. Les gentilhommes décident d'assassiner le roi car ils pensent que le prince est idiot et qu'ils peuvent devenir ses conseillers.
  Une fois le château endormi, le valet vole un cheval et se rend à Paris. Cinq jours plus tard, Ancelin arrive au château du roi et il lui parle du complot. Le roi envoie deux espions aux ducs pou r les aider à assassiner le roi ; ils lui disent qu'un serviteur a entendu leur conversation et leur envoie une lettre.
Quand les deux nobles avouent la vérité, les espions offrent une bouteille de vin pour fêter la mort du roi. Mais les espirons ne boivent pas le vin qui est empoisonné. Les deux ducs meurent et les deux espions se rendent au château du roi pour lui raconter la vérité. Le valet, Ancelin est fait chevalier.
24012018

lundi 16 juillet 2018

Héros d'un jour


« Devenez le héros dont vous avez toujours rêvé ! Contrat bien rémunéré en échange d'une disponibilité totale et de l'acception des conditions du contrat »Chômeur de longue durée, harcelé par sa conseillère qui ne comprend pas son envie d'autre chose, Steve se lance dans la rédaction d'une lettre de motivation succincte. Que dire à propos d'un emploi qu'on n'a pas exercé ou d'une entreprise qu'on ne connaît pas ? L'exercice lui semble insurmontable et il bâche sa copie.
Deux jours plus tard, son téléphone sonne et après une rapide conversation, il est invité à se rendre le soir-même dans les studios qui sont en fait un vaste camping-car garé sur le parking de la mairie. Intrigué et un peu inquiet, le jeune garçon tout juste âgé de dix-huit ans s'y rend et il toque à la porte le cœur battant. Sans ressources depuis la mort de ses parents, il n'a pas le choix en attendant de pouvoir toucher les allocations minimales de survie.
- Bonjour, je viens pour le poste.
- Entrez !
La femme entre deux âges à l'air revêche s'efface pour le laisser passer et il entre, intimidé.
- Bien, voici le contrat de travail, je vous laisserai le lire après que vous ayez signé le formulaire avec la clause de confidentialité. 
Sans réfléchir, il signe et il se plonge dans la lecture du contrat.
« Devenez le héros de votre propre vie ! Dans cette nouvelle téléréalité vous jouerez un rôle tiré au sort et vous devrez vivre ce que vis votre personnage. Il se fait tirer une balle dans le pied ? Vous aussi ! Il meurt ? Vous aussi ! Cette clause n'est pas négociable, les rôles sont tirés au sort. Un décès pour dix candidats. »
  Le jeune garçon tout juste sorti de l'adolescence hésite. La rémunération lui permettra de survivre jusqu'à la fin de l'année en vivant chichement et de reprendre des études grâce à des bourses. Dans un an, il pourrait espérer trouver un emploi rémunéré. Vingt-cinq mille euros pour ce rôle de quelques semaines plus la gloire. Mais si le tirage au sort est fatal ? Que deviendront ses rêves ? S'il ne signe pas, il ne les verra jamais se réaliser. Alors il signe.
Le jour du tirage au sort des rôles, il se montre nerveux mais il fait bonne figure parmi les participants sous l’œil des caméras. Vient le moment de tirer son rôle au sort. Il sera le premier à mourir !

mercredi 4 juillet 2018

Bloody Mary

  Les rideaux de velours tirés, la pièce est plongée dans l'obscurité et le jeune garçon frissonne de peur et d'excitation. Il allume une chandelle avec lenteur et cérémonie après avoir écouté les bruits de la maison ; il est seul, ses parents sont partis faire des courses et il a au moins une heure devant lui.
- Bloody Mary ! Bloody Mary !

  Par treize fois, il invoque Mary mais rien ne se passe. L'adolescent scrute les tréfonds du miroir et il soupire de soulagement. Au fond, il craignait que quelque chose lui arrive. Derrière lui, il ne voit pas l'ombre qui apparaît peu à peu et le visage de femme qui se matérialise. Le visage recouvert de sang se tord en un rictus grimaçant. Les yeux rivés sur son téléphone portable, il commence à rédiger un message à son meilleur ami lorsque les deux mains pleines de sang de la Vierge sanglante le prennent aux épaules et l'attirent vers le miroir avec un force contre laquelle il ne peut résister. Puis les mains lui labourent le dos et les épaules de leurs ongles pointus jusqu'à ce que mort s'ensuive sous les hurlements du jeune garçon.

  Le téléphone portable tombe sur le parquet s'égratignant au passage :
- J'ai testé le rituel de Bloody Mary, ça ne marche pas et toi, tu l'as testé ?

lundi 25 juin 2018

Contes de noël de derrière les bûches Liste de démission

premier janvier
- communiqué de presse pour s'excuser auprès des enfants du monde entier
- trouver un nouveau refuge pour mes rennes où ils seront bien traités
- rédiger les lettres de recommandation pour mes lutins
- faire leur solde de tout compte
- vendre les stocks (jouets terminés, matériel, matériau)

premier juin
- rapatrier mes rennes par avion
- construire des abris pour mes rennes et mes lutins
- racheter du matériel
- construire un grand atelier, un entrepôt, une étable pour les rennes
- retrouver mes lutins pour les inviter à venir me rejoindre
- réparer la climatisation
- acheter un bateau plus gros
- prévenir la presse de ne jamais divulguer l'emplacement de mon île privée, leur parler des mers du sud sans plus de précision

lundi 18 juin 2018

Chroniques vampirologiques Au fond du trou

  Etendue dans sa tombe froide, la faim commence à envahir la créature qui reste immobile, les yeux ouverts dans le noir. Depuis plusieurs jours, elle tente de percer la paroi de bois qui l'entoure. Ses mains aux ongles cassés par les tentatives pour s'extirper de sa prison lui font mal et elle grimace de douleur dans sa boîte. Elle ramène le tissu de son linceul autour d'elle avant de le mastiquer longuement. Il lui faudra sortir un jour, elle ne pourra pas toujours tromper la faim dévorante qui lui brûle les entrailles. Elle n'a plus de passé et elle ne comprend pas bien où elle est. Mais son instinct lui dit qu'elle doit quitter cette prison de bois au plus vite pour survivre. L'appel du sang se fait sentir mais elle n'ose pas s'aventurer dehors, pas encore. La peur est plus forte que la faim.

  La journée se passe dans des cauchemars où s'entremêlent des bribes de sa vie passée. Le soir venu, la créature ouvre les yeux et elle pousse de toutes ses forces sur la paroi de bois au-dessus d'elle. Des heures durant, elle s'acharne, la panique l'envahit, elle sent que l'aube se rapproche. Lorsque le panneau de bois se soulève enfin, de la terre tombe sur ses vêtements mais l'air frais qui lui parvient le lui a fait oublier. Debout dans son cercueil, le vampire réfléchit à la manière de se hisser hors du trou. Il note que la terre est encore meuble, sa tombe est récente même si le vampire ne parvient pas à évaluer le temps passé depuis sa mise en terre. Des trous, creusés par les fossoyeurs, dans la paroi de terre tassée par les années et dure comme la pierre lui servent d'échelle et il touche enfin l'herbe où il s'allonge. La faim lui tord les entrailles et il se met à quatre pattes pour courir sur la pelouse. Un chien errant lui sert de dîner et sa part d'humanité le regarde dans une plaque commémorative en métal. Il voit la créature qu'il devient et il imagine l'évolution à venir. Le vampire sent que le soleil va bientôt faire son apparition et il réfléchit. La mort dans l'âme, la créature s'étend dans la couche confortable formée par la terre retournée juste à côté du trou béant de sa dernière demeure. Elle attend le lever du soleil et sa délivrance. Apaisée, la créature s'endort et elle ne se réveille que lorsque la brûlure du soleil la mord atrocement. La douleur la consume et de longues minutes de souffrance l'attendent, elle le sait mais la délivrance est à ce prix.   Le mort-vivant amène son bras à sa bouche, il soupire, le renifle longuement puis il se résigne à mordre dedans. La douleur est intense mais il n'en a cure. La chose mastique longuement puis elle recommence encore et encore avant de s'assoupir le ventre plein. Le matin se lève et elle entend les bruits autour d'elle, le sol vibre et des voix lui parviennent. Elle s'assoupit et plus rien ne lui parvient du monde extérieur.

jeudi 7 juin 2018

La maison de la Baba Yaga

  La vieille femme voûtée file sa laine dans son mortier avant de relever la tête. Elle sort sur le pas de la porte de sa petite maison et elle flaire la forêt alentour. Elle empoigne son balai et elle trottine entre les arbres jusqu'à ce qu'elle trouve ce qu'elle cherche. Une petite fille aux longues tresses blondes saute dans l'eau. D'un geste preste, la sorcière l'assomme et la ramène chez elle, effaçant ses traces de son balai de genêt. La sorcière pique l'enfant sur une broche et la met à rôtir, en salivant d'avance. la maisonnette sans porte ni fenêtre oblige la sorcière à avancer courbée pour ne pas s'y cogner. Elle se dirige vers la chambre délimitée par un rideau où des serpents, des vers, des grenouilles et des crapauds murmurent.
- Mes enfants, vous avez été sages ? Le dîner sera bientôt servi. dit-elle avant de se retirer.

  La jambe d'os de la vieille femme claque sur le parquet tandis qu'elle prépare son macabre dîner qu'elle mélange dans un grand chaudron. Le repas prêt, elle va servir ses enfants qui sifflent et coassent avant de se diriger vers leur répugnant dîner encore fumant. Puis elle s'assied à sa table où elle mange sa pitance en faisant de grands bruits de succion.

  On toque à la porte et la baba Yaga se dirige à tâtons vers le mur d'où vient le bruit.
- Qui est là ?
- Yvan, je veux quitter ce monde.
- Bien ! Fais tourner ma maison et tu pourras passer. Es-tu sûr de ton choix ?
- Oui, baba.
La maison bouge lentement et elle effectue un demi-tour sur elle-même. Puis la vieille femme dit au jeune homme de s'avancer tout droit, il s'efface bientôt dans le mur tandis que la maison reprend lentement sa place initiale. La gardienne du monde des morts s'assied dans son petit fauteuil et elle soupire de satisfaction, elle a accompli sa mission.

vendredi 25 mai 2018

Aokigahara

   Perdu dans mes pensées, je marche droit devant moi. Je ne sais pas depuis combien de temps, je me trouve dans cette forêt hors du monde ; des heures, je suppose. Je marche sans penser à rien, je cherche le bon endroit. La nuit tombe et je dois cesser de marcher. Soudain, j'ai peur des spectres qui pourraient rôder autour de moi, j'entends des bruits que je ne reconnais pas et je frissonne autant de froid que de peur. Je songe que je voudrais que le matin vienne enfin mais je sais que je dois attendre plusieurs heures. J'écoute les bruits alentour, j'entends les animaux qui marchent mais aucun bruit humain.
  Assis contre un arbre, je réfléchis à la meilleure solution. Je décide de rester sur place et d'attendre le lever du jour pour rebrousser chemin. Je m'assoupis et transi de froid, je me roule en boule au pied d'un arbre parmi les feuilles mortes pour tenter de me réchauffer. La brume se lève et j'entends les feuilles craquer derrière moi. Inquiet à l'idée de me retrouver face à un animal inconnu, je me retourne. Un spectre marche juste derrière moi, sa silhouette transparente luit sous la lune et je peux nettement voir la corde passée autour de son cou. Il ne me remarque pas et je retiens un gémissement de terreur de crainte de me faire remarquer.
  Une fois le fantôme évaporé, je suis incapable de rester où je suis et pris d'une peur panique, je cours sans réfléchir, je manque de justesse des arbres qui surgissent devant moi au dernier moment sous la faible clarté lunaire. Bientôt, la fatigue ralentit mes jambes et je marche sans savoir où je vais. Je suppose que cette forêt a une fin et que je vais finir par la trouver. Soudain, je me trouve face à un pendu qui me regarde, les orbites vides. J'avais oublié les morts qui hantent ces bois. Prudemment, je contourne en un large cercle le cadavre qui semble me suivre des yeux avant de continuer ma route, gémissant de peur.
  Toute la nuit, je marche sans regarder autour de moi, je me sens observé et j'entends des bruits de pas me suivre à plusieurs reprises. Au matin, j'ignore totalement où je suis, je me demande même si je n'ai pas tourné en rond ces dernières heures. Incapable de m'orienter, je décide de nouveau de marcher droit devant moi jusqu'à quitter la forêt, ma réserve d'eau s'épuise mais le stress me coupe l'appétit et je ne souffre pas encore de la faim. Un souffle derrière mon cou me fait me retourner, un spectre me fait face. Terrifiée, je hurle et je cours droit devant moi. Lorsqu'au terme d'une journée de course folle, je quitte enfin la forêt, je suis devenue une furie aux yeux hagards et aux cheveux blancs.

samedi 19 mai 2018

Marécage et barque au clair de lune

Sur le marécage flotte une odeur de pourriture légère, une pourriture végétale qui flotte dans l'humidité ambiante. C'est le crépuscule, le jour tire à sa fin et les oiseaux de nuit commencent à chanter, tout est calme et il n'y a pas âme qui vive alentour.
Une barque au bois pourri dont les planches commence à se disjoindre flotte sur l'eau stagnante que rien ne trouble. Elle tourbillonne lentement comme dans un ballet lent et tranquille. De l'embarcation, une forte odeur monte, un peu entêtante, un peu douceâtre. Si on se penche plus avant, on peut apercevoir une robe bleu clair dont un jupon blanc dépasse. La femme semble dormir, innocente sous son masque de cire pâle. Mais elle n'a plus ni souffle ni battement dans la poitrine. Immobile, elle se balance au gré du courant.

mercredi 9 mai 2018

La flûte brisée

  Seul à l'arrêt de bus, par un jour pluvieux, Corentin joue un air triste qu'il tire d'une flûte de mauvaise qualité, la flûte en plastique qu'il a dû acheter pour le cours de musique à l'école. Il en tire des sons aigus et peu harmonieux pour passer le temps en attendant le bus qui arrivera dans une demie-heure. Il espère que quelqu'un le rejoindra mais il est seul dans la nuit tombante. Un bruit se fait entendre derrière lui et il sursaute alors que la nuit tombe.
 - Ce n'est qu'un chat qui joue dans le bois. Nigaud, va !
  Peu rassuré, il se colle contre le morceau de plastique qui signale l'arrêt alors que la pluie fait une timide apparition. Bientôt le crachin le fait frissonner de froid et il joue de son instrument en se félicitant qu'il soit en plastique et non en bois, pour jouer sous la pluie sans risque.
  Il entend les branches craquer derrière lui mais il ne se retourne pas, il se dit que ce n'est que le vent et il continue à souffler dans sa flûte. Il n'entend plus que le son de sa musique qui se mêle au chant du vent et au son cristallin de la pluie quand elle touche le sol.
  Lorsque le bus arrive, une petite fille qui descend remarque une flûte en plastique brisée en deux qui gît sur le sol. Elle se penche, elle voit un peu de sang et un morceau de tissu noir juste à côté. Horrifiée, elle en parle au chauffeur de bus qui allait repartir. Il descend regarder et il décide d’appeler la police qui se révèle incapable de donner une explication rationnelle. L'affaire est bientôt oubliée.

mercredi 2 mai 2018

Rêve de maison

  Chaque nuit depuis deux mois, je rêve que je dors dans une maison vide et silencieuse. Je suis seule et rien ne vient troubler mon sommeil jusqu'au matin. Je rêve que je rêve dans une maison inconnue.
  Un jour que je me promenais dans mon quartier, je l'ai vue. La maison dont j'avais rêvé. Intriguée, je me suis approché, les mains dans les poches pour mieux la voir. Oui, je reconnaissais parfaitement la forme des fenêtres et la disposition des pièces. Je m'approchais et j'ai mis la main sur la poignée de la porte d'entrée qui était ouverte. La maison était telle que je l'avais rêvée : vide, silencieuse, meublée mais sans âme qui vive.
  Je m'assoupis sur le canapé du salon, un canapé de velours vert foncé, moelleux comme dans un rêve. Je me réveillais deux heures plus tard dans le noir, la nuit était tombée, je trouvais à tâtons un interrupteur qui ne marchait pas. Un peu inquiet, j'ai cherché la porte à tâtons et je ne l'ai jamais trouvée. Elle avait disparu, j'étais seul dans le noir le plus complet. Des heures durant, j'ai fait le tour de la pièce et j'ai tenté de trouver une issue mais seuls des murs nus m'entouraient. De guerre lasse, je me suis endormie. Au matin, la maison avait disparu, j'étais allongée dans l'herbe humide de rosée.

lundi 30 avril 2018

Nanowrimo Avril 2018

Objectif 50 000 mots
Total 58 553 mots
Validation 24 avril
Objectifs atteints
Ecarts le minimum: 46 mots dans la journée (mais je n'étais pas chez moi ce we là); le maximum est à 6 651 mots dans la journée.
Défis annexes: un défi coiffure qui fut laborieux.

Bilan:
un récit en trois tomes qui me tombe sur les bras et un premier jet qui m'a bien aidée à faire exploser le compteur 

lundi 23 avril 2018

Balle de minuit

Tac, tac !
Le bruit claque dans la nuit, au clocher du village, minuit sonne tandis que la pleine lune éclaire la cour.

Guillaume ouvre un œil et s'étire. Il lui semble avoir entendu un bruit et il tend l'oreille, tout est calme autour de lui, il rabat la couverture sur son épaule et il se rendort.
- Miaou !
Un miaulement désespéré le fait sursauter. Un poids tombe à ses pieds et une masse soyeuse se colle contre lui.
- Noisettine, qu'est-ce qui te prend à la fin ? s'indigne l'homme.
Tremblante, la chatte se colle contre sa poitrine, cherchant la protection de ses bras. Il la caresse pour tenter de la rassurer et il lui chuchote des questions sans réponse.
- Qu'est-ce qui t'a ainsi fait peur, ma belle ?
Rassuré, l'animal s'endort contre lui et il se résigne à passer la nuit avec l'animal dans les bras.

Une heure plus tard, le bruit se fait de nouveau entendre et Guillaume se redresse dans son lit. Il caresse Noisettine et il lui murmure qu'il va aller voir. Il songe en passant sa robe de chambre qu'il est un peu bête d'imaginer que son animal va le comprendre et il se rend à la fenêtre de la cuisine. Une ombre passe dans la nuit et il lui semble voir la neige bouger. Un bruit se fait de nouveau entendre au-dehors et il n'y tient plus. La peur de passer la nuit avec ces bruits qui lui vrillent les nerfs surpasse la peur de ce que ce peut être. Il sait que dans l'immeuble, il est le seul locataire à ne pas être au ski, seul à ne pas être étudiant et à ne pas rentrer chez ses parents le week-end.

Il s'habille chaudement et lorsqu'il ouvre la porte de la cour intérieure, il regrette son lit et il envie Noisette qui dort au chaud. Il referme la porte et il entend gratter derrière lui. Blanc de peur, il imagine un monstre l'avoir suivi et il ouvre la porte en grand. Noisettine passe d'un bond dans la cour et il entend de nouveau le bruit dans la cour. Une ombre danse toujours sous la lune et il s'avance. La neige réduit sa tentative de passer inaperçu à néant.
- Tu joues avec moi ? dit une voix de petite fille.
Il ne voit rien autour de lui et il cherche à localiser la voix. Une ombre mince se devine devant lui et il voit clairement la masse ronde calée contre ce qui semble une hanche et un bras gracile qui tient un ballon.
- Oui.
Il n'a pas réfléchi et il voit la silhouette courir avec légèreté vers le centre de la cour. Une masse arrive entre ses mains et il comprend qu'il s'agit du ballon. Il tente de localiser la chose et il entrevoit une masse mouvante qu'il vise avec la balle. Un rire cristallin monte dans la nuit et durant une heure, ils se passent le ballon.
- J'ai gagné ! La partie est finie, tu as manqué dix fois la balle et tu as failli la faire tomber. Dix à zéro !
- Qui es-tu ?
- Je suis Laura, j'ai dix ans et mon père m'avait promis juré qu'on jouerait au ballon. Je l'attendais devant la porte et mon ballon m'a échappé, j'ai couru après lui et une voiture m'a fauchée il y a dix ans. Depuis j'attends que mon père tienne sa promesse mais il a déménagé et moi, je suis restée.

Guillaume songe qu'ils ont le même âge et qu'ils auraient pu se rencontrer dans d'autres circonstances si le destin n'avait pas fauché Laura en plein vol.
- Merci ! murmure la petite fille en disparaissant sous la lune.
Guillaume reste quelques temps dans le froid puis il siffle Noisette et il rentre se coucher. Il rêve de la petite fille toute la nuit, ils jouent au ballon dans la cour un jour d'été.

dimanche 15 avril 2018

Contes de noël de derrière les bûches Le remplaçant du père noël


   Une nuit d'hiver alors qu'il vient de rêver qu'il se trouve dans un avion en partance pour Bora-Bora, le père noël s'assied dans son lit. Malmené par ce réveil brutal, son bonnet de nuit lui tombe dans les yeux mais il n'y prend pas garde et il le repousse d'un geste agacé : il en a assez, il veut démissionner pour prendre une retraite bien méritée. Il est fatigué de faire son épuisant travail depuis des siècles, il veut profiter de la vie. Il songe que le mieux est de passer une petite annonce pour trouver son successeur et c'est apaisé par cette résolution qu'il se rendort alors que le vent souffle au-dehors. Dès le lendemain, il se met au travail en grignotant un croissant qu'il trempe dans son café noir, il liste les sites d'emploi du monde entier. Pour ne pas faire de jaloux, il décide de poster une annonce sur les plus gros sites internet de chaque pays du monde.

   Quelques jours plus tard, Pôle emploi lui envoie des CV et des lettres de motivation qu'il parcourt en bourrant le ventre d'ours en peluche de rembourrage. Il trie le millier de CV qu'il a reçu en éliminant rapidement les plaisantins. Bientôt, il ne lui reste qu'une centaine de candidats, il se fie à son instinct pour n'en conserver qu'une cinquantaine parmi les postulants français qu'il convie à passer un entretien.

   Il passe les trois semaines suivantes près de son ordinateur à s'entretenir avec les candidats. Il passe cinq heures par jour à raison de vingt minutes par entretien à cette tâche. Ses yeux rougissent à rester des heures devant un écran et le son n'est pas toujours optimal. Il finit cette période un peu dépité, il est décidément irremplaçable et il comprend qu'il doit accomplir son devoir. Toutefois, il se console car il a trouvé une jeune fille qui ferait un lutin convenable. Il espère juste que le climat ne sera pas trop rude pour elle : elle vient du Sahara et lui a assuré que si elle n'a jamais vu la neige, elle est certaine de s'y plaire.

   Quelques semaines plus tard, le père noël reçoit des lettres d'enfants du monde entier, les fêtes approchent. Il se désole car elles sont chaque année moins nombreuses, les enfants cessent de croire en lui de plus en plus tôt. Triste, il parcourt les missives qui demandent des jeux électroniques et il se sent encore plus triste car il aime fabriquer de vieux jouets à la main et non pas des jeux plein d'électroniques délicats. Cette année, il a décidé avec ses lutins de glisser de vieux jouets traditionnels au milieu des jeux électroniques pour les remettre au goût du jour : certains paquets sont sélectionnés aléatoirement pour recevoir les vieux jouets sculptés et peints avec amour dans son atelier.

  Alors qu'il range son bureau, il met la main sur la pile de CV qui prend la poussière, machinalement, il ouvre quelques enveloppes jusqu'à ce qu'il tombe sur la lettre d'un jeune garçon qui dit être passionné par noël depuis son enfance ; toute l'année, il attend les fêtes avec impatience. Animateur au chômage, il adore les enfants. De plus, il assure adorer les animaux et avoir raté sa vocation de vétérinaire, il sera ravi de prendre soin de ses rennes. Le vieux monsieur décide de tenter sa chance et il lui envoie un email qui reçoit rapidement une réponse, un entretien est fixé en visio-conférence pour l'après-midi. Nedeleg plait immédiatement au père noël, il parle avec des étoiles dans les yeux des préparatifs de noël et de ses déambulations régulières dans les rayons jouet des magasins qu'il avoue en rougissant. L'entretien se conclut rapidement et il rejoint la Laponie la semaine suivante emmitouflé dans un manteau bien trop léger pour la saison. Le père noël sourit et ils rentrent dans son palais où il lui offre des vêtements adaptés au climat. Puis il lui fait faire le tour des ateliers, il lui explique comment il organise son travail sur l'année et la répartition des tâches avec ses lutins. Le jeune garçon lui dit que ses parents ont tout fait pour le convaincre qu'il n'existait pas mais il est heureux d'avoir eu raison.

   Durant une année, il travaille d'arrache-pied et il gravit les échelons : lutin puis contremaître, il devient chef d'atelier avant d'être muté au service approvisionnement puis au service courrier. Enfin, il est nommé au service logistique qui gère les plannings des ateliers et les commandes de fournitures avant de terminer à la comptabilité. Au terme de l'année, il a donné toute satisfaction au père noël qui le reçoit en entretien.
- Je souhaite prendre ma retraite et j'envisage de vous nommer pour me succéder car vous êtes mon meilleur élément, vous avez demandé de vous-même à passer par tous mes services. Lorsque j'ai pris un mois de vacances pour la première fois de ma vie, vous avez su prendre les choses en main et régler les problèmes avec les fournisseurs, réparer les machines et planifier le travail. Tous mes lutins m'ont dit avoir été ravis de travailler avec vous et ils apprécient la modernisation que vous avez apporté dans les ateliers, que ce soit les flippers ou les jeux vidéos dans la salle de repos ou les livres de recettes que vous avez proposé à notre brigade de cuisiniers pour changer les menus qu'ils nous proposent depuis des années.
- Mais je suis un humain, je vais vieillir, je ne suis pas immortel comme vous l'êtes. Il faudra me remplacer dans quatre-vingt ans, au mieux.
- Vous deviendrez immortel tout comme moi, quelle question ! Et si vous le souhaitez, vous resterez éternellement jeune, il ne tient qu'à vous d'avaler la potion d'immortalité au bon moment. Qu'en dites-vous ?
- Suis-je obligé de m'habiller comme vous ? Devrais-je porter une longue barbe blanche comme vous ? demande Nedeleg en s'asseyant face à son employeur dans le bureau surchauffé.
- Non, bien sûr. Néanmoins, il me semble préférable de vous déguiser en moi la nuit de noël, il ne faudrait pas bouleverser les traditions, vous comprenez ? On pourrait vous voir. C'est une affaire tout à fait sérieuse et importante.
- Je dois réfléchir. Combien de temps resterez-vous pour me former ?
- Il te faudra toute une vie pour te former mais je pense que dans un an, tu seras fin prêt à voler de tes propres ailes. En attendant, nous travaillerons main dans la main et je me déchargerai petit à petit de mes responsabilités sur tes jeunes épaules.
- Je suis d'accord, ce sera avec joie que je te prendrai ta place, père noël.

  Un an plus tard, le père noël prend définitivement sa retraite, il a acheté une île déserte dans une zone peu peuplée de l'océan Pacifique qui lui a immédiatement plue. Elle est petite mais il a fait construire une maison assez grande pour que quelques lutins et son successeur viennent lui rendre visite lorsqu'ils le souhaitent.

jeudi 29 mars 2018

Dans le vide

- Moteurs coupés !
La voix synthétique retentit dans l'habitacle et Okasna se frotte la tête, du sang macule sa main et elle gémit dans le silence du vaisseau spatial. Elle se souvient alors vaguement de sa fuite, elle est montée dans son véhicule et elle a décollé droit devant elle toujours plus loin. Sa famille a été assassinée et elle sait qu'elle est la prochaine sur la liste, elle devait fuir sa planète trop petite pour que quelqu'un d'aussi connu qu'elle puisse longtemps s'y cacher. Mais pour aller où ? Sur le moment, elle n'a pas réfléchi et lorsqu'elle s'est évanouie, elle a réussi à enclencher le pilote automatique avant de s'effondrer. Les radars lui apprennent qu'elle est seule et que personne ne la poursuit. Elle se souvient de ce que vient de lui dire l'ordinateur de bord mais elle ne parvient pas à relancer les moteurs. Propulsé dans le vide, le vaisseau continue sa course à vitesse constante en suivant toujours la même trajectoire. Rien ne peut l'arrêter. Elle doit relancer les moteurs ou elle sera condamnée à avancer encore et encore dans le vide. Elle travaille durant des heures sans succès et elle avance toujours à grande vitesse. Le vaisseau a percuté de petits obstacles qui ont abîmé sa carlingue mais rien de grave dans l'immédiat. Epuisée, la femme s'endort. Cette nuit-là, elle rêve et à son réveil, elle se souvient que c'est son anniversaire aujourd'hui, elle a quarante-trois ans. Elle se glisse derrière le poste de pilotage où rien ne fonctionne et elle relève la tête. Un astéroïde arrive droit sur elle propulsé en sens inverse dans le vide. D'interminables secondes plus tard, la pierre stellaire a enfoncé l'habitacle du vaisseau. Pierre et métal imbriqués reprennent leur course dans le vide intersidéral.

mercredi 21 mars 2018

La fée prisonnière


   Blottie près de l'âtre, la fée se souvient avec nostalgie du temps où la magie était encore présente dans son foyer. Elle frissonne en entendant le vent hurler à l'extérieur de la petite maison de bois où elle vit, recluse. Ses cheveux d'or emmêlés, le visage noirci de cendres froides, la fée semble vêtue comme une souillon dans ses vêtements informes et déchirés. Avec un sourire triste, elle se laisse bercer par le vent qui hurle au-dehors avant de se replonger dans ses souvenirs. Autrefois, elle vivait au pays des fées et avec ses compagnes, elle batifolait à longueur de journée parmi les fleurs et l'herbe tendre. Un jour qu'elle se promenait dans le monde des hommes, elle tomba éperdument amoureuse d'un être humain aux longs cheveux de cuivre. Sentant le regard de la créature féérique, il s'était approché et il avait engagé la conversation. Ils se revirent plusieurs fois et enfin, elle accepta sa proposition de vivre à ses côtés. Reniée par ses sœurs, elle suivit l'homme dans sa demeure. Mais il l'enferma dans une pièce de sa maison et il lui ordonna de le rendre riche et aimé de tous, lui l'homme que l'on méprise pour sa pauvreté, son mauvais caractère et sa mauvaise éducation. La fée lui répondit qu'elle ne pouvait accomplir son désir, il devait agir pour obtenir ce qu'il désirait. Il revint la voir chaque soir pour lui demander si elle avait changé d'avis et devant son refus, il la maintient prisonnière en son logis. La fée se meurt mais elle ne peut accéder à son désir car sa magie ne fonctionne que si son désir est profond de réaliser le vœu qui lui est demandé. Les heures passent et le soleil se lève timidement au-dehors, elle entend les oiseaux se réveiller au dehors. Sa magie épuisée par sa fatigue et sa longue privation de nourriture, elle ne peut s'en sortir par magie. Derrière la porte, elle entend les pas de l'homme approcher. La créature magique utilise ses dernières forces pour saisir le chandelier en bronze qui trône sur la cheminée, vestige de jours meilleurs. D'un geste brusque, elle frappe au frond son tortionnaire. Le bois du parquet se teinte de rouge mais elle n'y prend garde, elle court vers la prairie fleurie pour rejoindre ses sœurs. Gravée dans sa mémoire, l'image du corps sans vie la hante mais la vue de sa prairie où ses sœurs dansent en rond sous la lune lui donne la force de chasser ce souvenir pour sourire et tendre la main à ses sœurs qui lui font une place dans leur ronde nocturne.

samedi 10 mars 2018

Bertold le voirloup V2

  Dans le village perdu au milieu de la forêt, on se racontait que Bertold avait donné son âme au Diable en contrepartie de pouvoirs nuisibles. Lorsqu'ils le croisaient, les gens de l'endroit murmuraient et le suivaient du regard avec curiosité et méfiance. Depuis qu'il a manifesté ses pouvoirs sans certitude que ce soit lui pour sauver un camarade de la noyade, la rumeur le suivait. A peine âgé de douze ans, il avait couru à la rivière juste à temps pour tendre une branche à un camarade d'école qui se noyait. Personne ne l'avait entendu, il ne savait pas nager et la branche salutaire lui avait permis de rejoindre le bord. Personne, pas même le jeune Bertold n'a su expliquer pourquoi il avait dû impérativement se rendre près du lieu de la noyade sur le champ. Le petit garçon avait raconté qu'il s'était souvenu avoir oublié un sac empli de noisettes lors d'une cueillette avec les enfants du coin effectuée plus tôt dans la journée ; puis il avait raconté avoir entendu des cris, mais pas grand monde n'a cru à une coïncidence. Cet enfant trop perspicace et rêveur inquiète dans le village, on lui attribue des pouvoirs qu'il ne possède nullement mais en ces temps reculés où la superstition et la chasse aux sorcières ont libre cours, ces qualités sont vite suspectes. Le camarade l'a remercié de sa bravoure et ne lui a plus adressé la parole depuis ce jour, certainement influencé par sa famille. 

 Bertold est seul, ses amis ne lui parlent plus mais par fierté, il n'en dit rien à ses parents. Ces derniers le quittent deux ans plus tard, terrassés par une épidémie. Livré à lui-même, l'adolescent tente de se faire embaucher à la journée dans les fermes environnantes mais sa réputation le précède même si par pitié, on l'emploie de temps en temps. Il n'ose pas partir, il a peur d'affronter le monde extérieur d'autant plus que sur son lit de mort, sa mère lui a avoué avoir donné l'âme de son futur enfant à naître au diable en échange de ce miracle. Un an plus tard, Bertold naissait. Il a hérité de la maison familiale, de la chèvre et du jardin attenant. Il comprend mieux la honte de ses parents suite à la révélation du secret entourant sa naissance et il devine l'origine des choses étranges qui lui arrivent régulièrement depuis toujours. Mais il n'est pas pour autant maléfique, bien au contraire même si l'intuition paysanne a deviné le secret de sa naissance bien avant lui. Ses cheveux roux et ses yeux d'un vert pâle qui illuminent sa peau blanche parsemée de taches de rousseur, sa silhouette mince contraste avec la carrure musculeuse de ses parents, tous deux bruns à la peau tannée par le soleil ; au fond de lui, il a toujours douté de sa filiation, il a longtemps pensé être un enfant abandonné recueilli par ses parents mais il doit se rendre à l'évidence, il est bien leur fils, sa mère ne peut plus enfanter depuis sa difficile naissance, un soir d'automne, elle le lui répète souvent. Rêveur, idéaliste et avec le goût de l'étude, le jeune garçon avait eu la satisfaction de briller en classe mais la vie à la campagne l'obligeant à aider ses parents aux champs dès son plus jeune âge, comme tous ses camarades, il n'a jamais eu la chance de pouvoir poursuivre son éducation. Néanmoins, il dévore tous les livres qu'il peut trouver même si dans cette campagne reculée, il s'agit surtout d'almanachs ou de livres de recettes de cuisine qui changent de la Bible. 

  Un jour, las de ces racontars et de ces murmures incessants, le jeune homme de dix-sept ans remplit un sac d'un peu de nourriture et de quelques vêtements de rechange afin d'aller voir un sorcier qui vit à deux jours de marche. Glacé dans le froid nocturne, il passe la nuit le dos collé contre le mur d'enceinte d'un village où il n'avait pas osé demander hospitalité, trop habitué au rejet. Un chien vient le renifler et sous ses caresses insistantes, il accepte de se coucher contre lui. Réconforté par cette présence, Bertold dort mieux cette nuit-là. 
Au matin, le vieux sorcier l'accueille dans sa petite maison de bois et il écoute attentivement son récit. Bertold lui raconte qu'il envisage de donner raison aux habitants pour ne plus avoir à subir quolibets et rejet pour rien. Le sorcier le regarde longuement avant de se décider à parler. 
- Les voirloups sont des créatures fascinantes mais leur ressembler coûte cher, très cher. Et les ingrédients nécessaires sont difficiles à trouver et hors de prix.
- Pouvez-vous me les fournir?
- Bien sûr. répond le sorcier avec un sourire mauvais. Mais es-tu certain d'être prêt à en payer le prix ? 
- Oui. 
Le vieil homme hausse les épaules avant de se mettre à fureter parmi ses pots en murmurant des choses incompréhensibles. 

  Rentré chez lui, Bertold traite les ingrédients pour être en mesure de les conserver et pouvoir refaire la potion plusieurs fois. Il réfléchit tout le jour aux conséquences de ses actes mais le soir, il cède, furieux d'avoir été une nouvelle fois invectivé sans raison ; alors qu'il allait acheter une miche de pain, le boulanger lui avait dit de déguerpir car il allait faire fuir les clients si on le voyait là, il n'avait su que répondre et il avait jeté le pain dans son sac avant de rentrer chez lui, la mort dans l'âme. Triste, il fabrique avec frénésie la mixture et à minuit, elle est prête.
- Sang de vierge, graisse rance de porc tué le vendredi saint à trois heures de l'après-midi, semence, bave du diable, tout y est. L'amalgame est prêt!
Il avait eu bien du mal à obtenir les ingrédients nécessaires. Une toute jeune fille rencontrée lors d'une fête de village à qui il avait fait boire plus d'un vin fort de la région qu'il n'était raisonnable lui avait fourni le sang qu'il avait recueilli dans une fiole avant de la laisser endormie dans l'herbe d'un champ proche du village où elle vivait. Au vu de son très jeune âge, il pouvait supposer avec raison qu'aucun homme n'avait jamais posé la main sur elle. La graisse de porc lui venait d'un pot de rillettes offert par son voisin l'an passé dont le porc était mort la vieille du jour saint et dont ils avaient rapidement récupéré ce qui pouvait l'être ; il avait reçu en remerciement des rillettes issues de ce porc qu'il gardait précieusement pour l'hiver et un jambon qui pendait au plafond, bien entamé. Une sorcière qu'il était allée voir bien loin au-delà de la forêt l'avait éclairé sur la bave du diable qui n'était que de la bave de crapaud. Un peu de sa propre semence avait achevé de compléter les ingrédients nécessaires à la confection de la potion qu'il avait laissé mijoter dans un peu d'huile afin d'en avoir une quantité suffisante pour l'étaler sur son corps, il espérait que ce subterfuge ne dénaturerait pas le sortilège si d'aventure, il devait fonctionner. 

   Lentement, le jeune paysan regarde le soleil décliner sur l'horizon puis la nuit venue, il ne garde qu'une chandelle allumée posée sur la table à côté de lui qu'il remplace au fur et à mesure de sa fonte. Enfin le clocher du village sonne onze fois, il peut commencer ses préparatifs et réfléchir encore à sa décision. Une heure plus tard, il est prêt à accomplir son dessein. 

 Au premier coup de minuit, il s'enduit les membres inférieurs avec la mixture qu'il étale en couche aussi fine qu'il le peut pour en avoir suffisamment. Il imagine avec horreur les ingrédients pénétrer sa peau et son corps mais il est trop tard, il ne peut plus reculer. L'onctueuse graisse de porc s'étale comme un baume sur son corps et sur son cœur meurtri. Puis il s'adresse au Seigneur des ténèbres, il implore dans une longue litanie le Diable en personne de lui accorder ce qu'il demande afin de lui permettre d'accomplir sa vengeance. Puis il attend, le cœur battant dans la nuit, transi de froid, nu sous la lumière de la lune lorsqu'un souffle venu de la cheminée éteint la bougie et le glace jusqu'aux os. De longues minutes s'écoulent et peu à peu, il se réchauffe. Intrigué, il remarque qu'une noire fourrure a commencé à le recouvrir et il ferme les yeux, soulagé de voir sa requête accordée mais un peu inquiet de se retrouver à jamais prisonnier de ce corps qui n'est pas le sien. La douleur irradie dans tout son être, ses muscles le brûlent, il serre les dents pour ne pas hurler et alerter les voisins, sa peau s'embrase et il reste de longues minutes à se tordre de douleur sur le sol, impuissant face à la vague brûlante qui l'assaille. Il a peur et il songe à sa stupidité. S'il errait sous la forme d'une bête condamné à ne pouvoir redevenir humain ? Si on le tuait ? Ne va-t'on pas le démasquer et l'accuser puis le bannir ou le brûler comme sorcier ? Etait-ce la seule solution ? Empli de douleur, il pleure et il tente d'étouffer les sanglots inhumains qui le secouent. Enfin, la vague qui lui broyait le corps s'apaise et il ouvre les yeux en grognant. 
 Puis, tout bascule. Transformé en loup, il pousse un hurlement qui réveille certainement tout le village avant de fuir de toute la force de ses quatre pattes vers le refuge de la forêt. Deux heures durant, il court parmi les arbres, empruntant des chemins qu'il redécouvre avec des yeux habitués à l'obscurité. Lorsqu'il massacre une biche qu'il prend à la gorge pour le plaisir de tuer, une part de lui est écœurée de sa cruauté mais une autre jouit de sa puissance. L'appel du sang et du mal se fait plus pressant et il prend le pas sur sa raison. Il se rapproche du village endormi à pas de loup, évaluant les méfaits qu'il pourrait causer. 

  Alerté par sa présence, un chien hurle dans la nuit et le jeune homme-loup étire ses babines en un sinistre sourire. A pas de loup, il approche sa victime et d'un coup de dents, il l'égorge avant de la dévorer. Méthodiquement, il tue tous les chiens du village, ceux qui grognent et montrent les dents sur son passage puis il s'attaque aux petits troupeaux de ces paysans pauvres, dévorant moutons et chèvres en silence. Ses pas étouffés par l'herbe, il approche ses victimes et d'un coup de dent, il met fin à leur vie avant de s'attaquer à la bête suivante, proie innocente et sans défense. Il craint de croiser quelque voisin et de commettre un meurtre imprévu. Au matin, les habitants découvriront la peau et les os des bêtes gisant dans une mare de sang séché sans que nulle trace ne les mène à l'exécuteur. 

  Bien décidé à se venger de ses voisins qui l'humilient depuis des années sans jamais se demander ce qu'il peut bien ressentir ou s'il souffre, Bertold profite de ses nouveaux pouvoirs pour mettre le village sens dessus dessous. Du regard, il se concentre longuement sur des tas de paille car il sent confusément qu'il peut y mettre le feu à distance. Et quelques minutes plus tard, une mince fumée commence à s'échapper des bottes de paille ; satisfait, le jeune homme fuit à toutes pattes vers une colline proche où il pourra se délecter du spectacle. De loin, il admire son œuvre, tout le village envahi de feux silencieux s'illumine dans la nuit; peu après, les hommes se réveillent et hurlent à leur ruine probable. Bertold se délecte de ce spectacle, il ne voit pas passer les heures, allongé dans l'herbe tendre et protégé du froid par son épaisse fourrure. Il se souvient à temps qu'il doit rentrer chez lui avant l'aube.

  Ombre furtive, il se glisse jusque chez lui alors que la nuit achève de s'écouler inexorablement. Une femme le voit et tire une flèche dans sa direction ; touché à la cuisse, il retient un cri de surprise et se fond dans la nuit après avoir tenté d'imiter le gémissement d'un chien qu'on aurait blessé et se retenant de hurler comme le loup qu'il est devenu. Une heure plus tard, il parvient à se glisser dans sa maison, l'aube pointe. Bien qu'il ne ressente pas la douleur, l'arme l'avait gêné pour courir dans le noir. Sa nyctalopie l'aidant à se faufiler dans les fourrés, il a décidé de prendre le risque de perdre du temps à contourner le village pour se donner plus de chance d'éviter les groupes chargés de trouver le coupable avant d'avoir atteint sa maison.
  Rentré chez lui, le jeune garçon reprend peu à peu forme humaine, il ôte la flèche plantée dans sa cuisse et se soigne après avoir brûlé le bois de l'arme et jeté la pointe aussi loin que sa force le lui a permis dans la nuit. Alors que l'aube se lève, sa peau de loup éclate, le sortilège a enfin cessé mais il le protège de la douleur, il ne ressent rien à son grand soulagement ; l'horreur de voir la fourrure se fendre pour laisser apparaître sa peau tannée est suffisante. Bertold est redevenu lui-même. Il brûle la peau du loup puis il se couche, épuisé. Il ne s'éveille qu'à midi, encore fatigué de sa longue nuit puis il se promène dans le village. C'est un jour de marché et on ne parle que des dégâts de la nuit. Personne n'a rien vu et on s'interroge sur l'origine des dommages. Le voirloup écoute attentivement les conversations et note les villageois qui nourrissent des soupçons à son encontre ; il se découvre le pouvoir de lire les missives où l'on parle de la créature mais personne ne le soupçonne réellement pour le moment. Il le regrette presque, il aurait eu grand plaisir à punir ceux qui devinent sa vraie nature. Satisfait, il rentre chez lui, les mains dans les poches. Il avait repéré quelques mauvaises actions qu'il pourrait commettre la nuit venue pour profiter de sa nature. Même si les souvenirs de la nuit passée sont flous, il se souvient du plaisir ressenti à ses méfaits, de sa puissance physique et du sentiment de liberté qu'il a connu durant ces quelques heures. 
Ce soir-là, alors qu'il se lave, il remarque la tache rouge en bas de son dos ainsi que la fourche bifide sur son épaule gauche. Satan avait marqué son âme et son corps en souvenir de l'aide qu'il a accordé au jeune paysan. Le garçon sourit doucement à l'idée qu'il lui reste suffisamment de mixture pour se transformer plusieurs fois en bête et se venger de ses ennemis lorsque l'envie de faire le mal prendrait le dessus sur la prudence et ses restes d'humanité. Puis il lui faudrait quitter le village, l'âme apaisée et tout désir de vengeance envolé. 
Les deux pleines lunes suivantes, Bertold se transforme de nouveau pour accomplir d'autres forfaits dictés par son imagination débordante : piétiner les champs et détruire les cultures, pénétrer dans les caves pour dévorer les jambons pendus au plafond et percer les tonneaux de bière et de vin. Peu à peu, il sent les regards peser sur lui, plus insistants, il frissonne et il comprend qu'il doit partir bientôt pour ne pas se trouver accusé de sorcellerie. Sa mauvaise réputation, la mixture étrange dont il ne lui reste qu'un fond et son isolement social le condamneraient à coup sûr. On murmure dans le village et si on ne trouve pas la cause des dommages qui surviennent la nuit, on cherchera un bouc émissaire. Et il a de plus en plus de mal à éviter les patrouilles qui se multiplient. La mort dans l'âme, il se promène longuement dans le village, humant le vent. Un vol de corbeau fuit vers la forêt et il rentre chez lui en trottinant, l'âme apaisée. 

 A la nuit tombée, son sac sur l'épaule, il prend le chemin qui s'éloigne du village. Seul dans le noir, il marche vite, épiant les bruits alentour. Il a soigneusement nettoyé le pot de mixture et brûlé les restes des ingrédients nécessaires à la préparation, nul ne pourra le soupçonner. Il a bien songé brûler sa petite maison mais il n'en a pas eu le cœur. Ses maigres possessions à la main, il trottine rapidement dans le village craignant de réveiller les chiens qui veillent mais ils le reconnaissent et ils jappent doucement à son passage. Il sourit ; au moins, les chiens survivants qui accompagnaient leurs maîtres lors d'une grande chasse nocturne, lui auront dit au revoir et souhaité un bon voyage. Loin du village, il pourra se faire une réputation et fonder une famille, son destin n'est qu'à quelques jours de marche ; le sourire aux lèvres, il avance d'un bon pas en sifflotant dans l'air froid tandis que s'allument les premières étoiles dans le ciel. Il ira confesser une partie de ses méfaits auprès d'un prêtre lorsqu'il se sera suffisamment éloigné et il donnera quelques-uns de ses maigres effets pour qu'ils soient redistribués aux plus pauvres dans l'espoir d'obtenir le salut de son âme et le pardon pour ses péchés. Comme il sait lire, écrire et compter, il peut espérer trouver un emploi correctement rémunéré et s'il se prive du superflu, il pourra se montrer généreux pour les plus démunis sa vie durant. Confiant, il presse le pas, il est persuadé qu'au fil du temps, les marques du démon s'effaceront de son corps et de son âme lorsqu'il se sera montré suffisamment bon pour mériter la rédemption. 

Gaffe aux gaffes Gaffophone en mouette rieuse majeure

  Dix heures sonnent dans la rédaction et tout l'équipe se dirige vers la cuisine pour prendre un café.  Profitant du calme ambiant, Gaston se met à jouer du gaffophone pour se détendre et en réaction, toute l'équipe sursaute, les tasses pleines volent et les cris fusent. Dérangée, la mouette rieuse qui  dormait sur le haut du réfrigérateur se met à crier à son tour. Furieux, le volatile donne des coups de becs aux intrus pour les faire taire ; bientôt, ils quittent la pièce en hurlant. Satisfaite, la mouette rieuse s'endort tandis que l'équipe vient dire à Gaston de cesser de faire du bruit. Il ronchonne mais il s'attendrit lorsque la mouette, qui n'est pas parvenue à se rendormir, se pose près de lui au moment où ses collègues quittent la pièce pour tenter de reprendre ses droits dans la cuisine.

  Gaston caresse l'oiseau et il lui dit sur le ton de la confidence.
- Tu sais, ici, ils ne savent pas reconnaître le talent. Je me souviens encore du jour où je suis arrivé. J'ai croisé Fantasio dans le hall, il m'a regardé d'un air étonné en me demandant qui j'étais et ce que je faisais là. Je lui ai répondu qu'on m'avait dit de venir et que j'attendais parce qu'on m'avait engagé pour travailler. Après quelques temps, il m'a dit d'aller classer le courrier en retard et qu'on m'avait certainement embauché pour ça. Mais il ne m'a même pas demandé ce que je savais faire. C'est dommage d'ailleurs, peut-être que mes inventions leur plairaient mieux si j'avais été embauché comme inventeur et non comme préposé au courrier. Bon, ils ont quitté la cuisine, je vais aller me préparer un sandwich avant de me remettre à l'élaboration de mon nouveau carburant.

lundi 5 mars 2018

Gaffe aux gaffes Effet boule de neige

  Prunelle entre dans le bureau de Gaston, le rouge aux joues.
- Gaston, je ne veux plus voir ça ici !
Furieux, il désigne de son doigt pointé la boule de bowling de Gaston qui le regarde sortir, un peu surpris.
- Je ne comprends pas pourquoi elle le gêne tant ! Cette boule de bowling ne dérange pourtant personne ! Je vais la cacher, il n'en saura rien.
Après quelques minutes de réflexion, l'employé au courrier revient dans la pièce où il s'enferme. Il coupe, coud et colle jusqu'à obtenir ce qu'il avait en tête. Fier de lui, il place le pouf improvisé dans un coin de son bureau et il commence à classer le courrier en retard.
Une heure plus tard, Prunelle entre dans la pièce, un cahier sous le bras, lorsqu'il voit Gaston endormi sur le tas d'enveloppes, il lève les yeux au ciel ; toutefois, il note qu'il a visiblement trié une partie du courrier qui envahit la pièce.
- Debout, c'est l'heure ! lui hurle-t'il à l'oreille.
Il regarde sa montre alors que Gaston lui demande ce qui se passe d'une voix ensommeillée puis il quitte la pièce.
- Bien, Gaston, il vous reste deux heures avant la fin de la journée. Je vous regarde!
  Son cahier sur les genoux, Prunelle prend des notes et il s'absorbe dans son travail tout en observant Gaston du coin de l'oeil qui commence à trier mollement le courrier. Le sol un peu trop dur lui fait mal et il décide qu'il ne peut pas rester assis en tailleur sur la moquette jusqu'au soir. Il tente de s'installer au bureau mais le chat de Gaston l'observe d'un air mauvais et il renonce. Il remarque alors le pouf dans un coin de la pièce et il se laisse tomber dessus, ravi de pouvoir s'installer confortablement.
- Aïe ! Mais qu'est-ce que... ?
Rouge de colère, Prunelle se frotte le derrière en soulevant le pouf. Il se rend compte que le fauteuil a été évidé de façon à permettre de loger la boule de bowling sous le pouf. Furieux, Prunelle hurle après Gaston qui a prudemment quitté les lieux en le voyant s'approcher de la cachette de sa chère boule de bowling.
- Gaston, je veux que le courrier soit trié d'ici ce soir et je ne sortirai pas d'ici tant que ce ne sera pas fait ! le menace Prunelle, rouge de colère. 

mercredi 28 février 2018

Gaffe aux gaffes Contra(ts)riétés au poêle

  En cette fin de matinée glaciale, Gaston range son bureau. Dans un tiroir, il retrouve un peu de son savon ; même s'il se souvient que Prunelle lui avait dit ne plus jamais vouloir voir cette chose dans les lieux, le préposé au courrier sourit en se souvenant qu'il est en congé.
- Il serait dommage de gâcher. Je sais, je vais le mettre dans les sanitaires, il n'y a jamais  de savon dans le distributeur. Une goutte et les mains sont propres, si ce n'est pas merveilleux !
Il s'exécute à l'insu de tous et il constate qu'en effet, le distributeur de savon était vide comme à l'accoutumée.
Quelques minutes plus tard, monsieur Boulier sort des toilettes en hurlant.
- Qui a trafiqué le savon ??
Le couloir est envahi de mousse et personne ne sait d'où elle provient. Enfin, le comptable émerge de la masse aérienne en faisant remarquer qu'il a besoin d'aide pour sortir de cet enfer. Gaston arrive un sandwich à la main et il demande :
- Alors, vous le trouvez comment mon savon ? Il lave bien, hein ? Mais attention, il ne faut pas en mettre plus d'une goutte. Il est pratique et économique, vous ne trouvez pas ?
Sous les cris de monsieur Boulier, Gaston s'enfuit et il s'enferme dans son bureau en disant qu'il est incompris dans cette entreprise. Son chat dans les bras, il se dirige vers son bureau encombré en frissonnant.
- Il fait froid aujourd'hui ! Ils n'ont même pas démarré les radiateurs !

  L'employé au courrier décide d'utiliser son système de chauffage personnel. Dans les tiroirs de son bureau en métal, il met le feu à du charbon. D'ordinaire, il se sert du dessus du bureau pour se confectionner des petits plats pour se donner des forces et affronter la journée. Mais, attristé par l'incident de la matinée, il décide de déjeuner à l'extérieur. Il croise Monsieur de Maesmaker dans le hall, celui-ci le regarde un peu inquiet en songeant qu'au moins, il ne sera pas dans les bureaux. Dans les locaux déserts, l'homme d'affaire entend un bruit étrange. Un peu inquiet, il pénètre dans le bureau de Gaston et il remarque que la souris s'amuse à plonger dans le bocal du poisson rouge.
 L'homme pose les contrats qu'il tient à la main et il se perd dans la contemplation de ce curieux manège durant de longues minutes. Fantasio, prévenu de l'arrivée du visiteur, toque à la porte, un peu inquiet de le trouver là. Un regard alentour le rassure, Gaston n'est pas dans les parages et tout est calme.
- Bonjour, monsieur de Maesmaker ! Une bien belle journée pour signer ces contrats, n'est-ce pas ?
- En effet ! dit-il d'un ton aimable en lui tendant la main.
Les salutations d'usage échangées, le futur collaborateur se souvient des contrats, il tend la main pour les récupérer sur le bureau où il les a posés mais une vive douleur lui fait lâcher prise au contact de la surface métallique. Furieux, il déchire les contrats en criant qu'il ne remettra pas de sitôt les pieds dans cette maison de fous. Malgré les tentatives de Fantasio pour le calmer, il part en claquant la porte derrière lui. Lorsque Gaston revient, un sandwich à la main, il constate, ravi, que la température de la pièce s'est réchauffée.

Gaffe aux gaffes Photocopieuse farceuse

 Ce matin-là, Gaston est arrivé avant tout le monde. Après s'être assuré que personne ne se trouve dans les parages, il se dirige vers la photocopieuse avant de rentrer dans son bureau en gloussant. Peu après, Fantasio s'avance dans le couloir en sifflotant un air à la mode, une liasse sous le bras. Il observe son reflet dans la vitre, rajuste le col de sa chemise et il se poste à l'accueil où il n'a pas longtemps à attendre.
- Bonjour, monsieur de Maesmaker, je suis heureux de vous voir pile à l'heure. Les locaux sont déserts, nous pourrons signer tranquillement ces fameux contrats. Je vous prie de m'attendre un instant, je les photocopie et je suis à vous.
Fantasio s'engage dans le couloir et il met la liasse dans la photocopieuse avant de tourner sur sa droite pour se diriger vers la machine à café pour fêter dignement ce jour historique d'un liquide noir comme l'encre utilisé pour parapher les contrats. Puis il revient en chantonnant, il ne lui reste qu'à récupérer les contrats en passant et il pourra crier victoire.

 Dans le hall, il heurte monsieur de Maesmaker qui sort en trombe, l'inondant de café brûlant.
- Je ne remettrai plus jamais les pieds dans cette maison de fous, on ne m'y reprendra pas !
Fantasio le regarde sortir, interloqué puis il regarde autour de lui afin de comprendre l'objet de la colère de l'homme d'affaires. Des avions en papier jonchent le sol du couloir  et de l'entrée. Le rédacteur en chef fulmine et il se rend à la photocopieuse pour comprendre ce qui a mis son interlocuteur en colère: un dispositif fixé à la sorte de l'appareil attire son attention. Il appuie sur le bouton et il se rend compte que l'appareil plie les feuilles et les propulse dans les airs sous forme d'avions en papier.
- Mais qui a fait ça ? Qui m'en veut à ce point ?
Furieux, il détruit le dispositif et il le jette dans la corbeille à papier avant d'aller s'enfermer dans son bureau.

 Un peu plus tard, Gaston sort pour voir si son dispositif fonctionne. Les avions en papier qu'il trouve dans la poubelle le remplissent de joie, son invention marche ! Il prend un café et il rejoint son bureau, le sourire aux lèvres : la journée des ses collègues sera illuminée par cette remarquable invention.

mercredi 21 février 2018

Gaffe aux gaffes Vacances au bureau


En ce vendredi, Gaston est seul car tout le monde est soit en congé, soit en réunion. Désoeuvré, il erre dans les bureaux, les mains dans les poches.

- Oh et puis zut à la fin, pourquoi suis-je seul aujourd'hui ? Je n'ai rien à faire.

De retour dans son bureau, le jeune homme fouille dans son placard pour trouver un sac de couchage qu'il remplit avec le courrier en retard qui jonche la pièce avant d'en coudre l'extrémité. Puis il trouve une couverture et il s'apprête à entamer une sieste bien méritée lorsqu'il remarque l'engrais qu'il vient de terminer qui l'attend sur son bureau.

- Mince alors, je l'avais oublié !

Consciencieusement, il verse le flacon au pied de son cactus avant de s'installer pour dormir un peu. A son réveil, à dix-huit heures, il se croit au milieu d'une forêt lorsqu'il comprend que c'est seulement son cactus qui a bien grandi durant les dernières heures.

- Mince alors, mon engrais a très bien fonctionné mais où vais-je bien pouvoir te mettre ?

Avec grandes difficultés, il met le cactus dans l'ascenseur avant de descendre les escaliers en courant. A l'accueil, il récupère le végétal qu'il installe dans le hall d'entrée.

- Voilà, une plante verte, ça égaye tout de suite une entreprise. Bon, il est temps de rentrer à la maison.



Le lundi matin, Prunelle hurle en tombant nez à nez avec le monstrueux végétal.

- Qui a mis ce monstre ici ?

La plante envahit la moitié du hall et elle risque de blesser les personnes qui entrent. Le rédacteur en chef reconnaît alors le cactus de Gaston et il fait appel à un professionnel pour les en débarrasser. Le jardinier arrive deux heures plus tard en même temps que le légitime propriétaire de la plante.

- Je n'ai jamais vu une bête pareille ! Vous avez encore de cet engrais, dites ? Il me serait bien utile pour les fruits et légumes que je vends sur les marchés... Bon, par contre, pour le sortir, je ne vois pas d'autres solutions que la tronçonneuse...

Gaston s'évanouit et le jardinier se gratte la tête perplexe. Il fait appel à son cousin qui est déménageur professionnel. La plante bien emballée pour la protéger au mieux, ils forcent le passage pour la sortir par la porte d'entrée ; quelques branches se cassent dans l'opération mais le cactus bien vivant trouve peu après une nouvelle demeure au jardin botanique. Gaston un peu triste lui promet de lui rendre très souvent visite. Il récupère une branche cassée dont il fait une bouture afin de garder toujours près de lui son cactus adoré.