mercredi 21 mars 2018

La fée prisonnière


   Blottie près de l'âtre, la fée se souvient avec nostalgie du temps où la magie était encore présente dans son foyer. Elle frissonne en entendant le vent hurler à l'extérieur de la petite maison de bois où elle vit, recluse. Ses cheveux d'or emmêlés, le visage noirci de cendres froides, la fée semble vêtue comme une souillon dans ses vêtements informes et déchirés. Avec un sourire triste, elle se laisse bercer par le vent qui hurle au-dehors avant de se replonger dans ses souvenirs. Autrefois, elle vivait au pays des fées et avec ses compagnes, elle batifolait à longueur de journée parmi les fleurs et l'herbe tendre. Un jour qu'elle se promenait dans le monde des hommes, elle tomba éperdument amoureuse d'un être humain aux longs cheveux de cuivre. Sentant le regard de la créature féérique, il s'était approché et il avait engagé la conversation. Ils se revirent plusieurs fois et enfin, elle accepta sa proposition de vivre à ses côtés. Reniée par ses sœurs, elle suivit l'homme dans sa demeure. Mais il l'enferma dans une pièce de sa maison et il lui ordonna de le rendre riche et aimé de tous, lui l'homme que l'on méprise pour sa pauvreté, son mauvais caractère et sa mauvaise éducation. La fée lui répondit qu'elle ne pouvait accomplir son désir, il devait agir pour obtenir ce qu'il désirait. Il revint la voir chaque soir pour lui demander si elle avait changé d'avis et devant son refus, il la maintient prisonnière en son logis. La fée se meurt mais elle ne peut accéder à son désir car sa magie ne fonctionne que si son désir est profond de réaliser le vœu qui lui est demandé. Les heures passent et le soleil se lève timidement au-dehors, elle entend les oiseaux se réveiller au dehors. Sa magie épuisée par sa fatigue et sa longue privation de nourriture, elle ne peut s'en sortir par magie. Derrière la porte, elle entend les pas de l'homme approcher. La créature magique utilise ses dernières forces pour saisir le chandelier en bronze qui trône sur la cheminée, vestige de jours meilleurs. D'un geste brusque, elle frappe au frond son tortionnaire. Le bois du parquet se teinte de rouge mais elle n'y prend garde, elle court vers la prairie fleurie pour rejoindre ses sœurs. Gravée dans sa mémoire, l'image du corps sans vie la hante mais la vue de sa prairie où ses sœurs dansent en rond sous la lune lui donne la force de chasser ce souvenir pour sourire et tendre la main à ses sœurs qui lui font une place dans leur ronde nocturne.