dimanche 20 juin 2021

Chroniques vampirologiques Eternité et amours contrariées V1

   Un bruissement d'ailes fait sursauter l'homme qui se retourne le cœur battant. Une chauve-souris marron le fixe de ses yeux injectés de sang. Il siffle pour la chasser en la fixant droit dans les yeux et la créature ailée s'envole en glapissant son indignation.

- Où êtes-vous? interroge-t'il à voix basse en cherchant dans la nuit. Kate?
La nuit reste silencieuse et il commence à s'inquiéter.
- Je pense être la seule créature nocturne dans les parages pourtant... Un autre vampire? Je le saurais, je pense. s'interroge-t'il en écoutant avec plus d'attention. S'il lui était arrivé quelque chose? Ou si elle ne venait pas?
Un trottinement le fait se retourner près de la grille en fer forgé du cimetière et il soupire de soulagement, elle est là. Il se rapproche et il voit la jeune fille lui sourire.
- Drôle de lieu pour un rendez-vous? Vous ne trouvez pas? Vous avez oublié de me donner votre numéro de téléphone...
- Mon téléphone est en réparation et nous nous sommes croisés si brièvement tout à l'heure que j'ai dit la première chose qui m'est passée par la tête. répond-il, bien conscient que c'est une erreur qui pourrait lui coûter l'anonymat qui le protège depuis quatre siècles.
La jeune fille regarde autour d'elle et elle hausse les épaules.
- C'est original pour un premier rendez-vous. admet-elle en repoussant ses cheveux blonds en arrière. Venez, allons boire un verre dans un endroit plus approprié.

  Il la suit à contrecoeur en s'interrogeant. Il craint que son teint pâle et ses vêtements démodés qu'il a volés dans une tombe fraîchement creusée et soigneusement refermée ne le trahisse. Il examine la chemise blanche et le strict costume noir soigneusement coupé en se disant que cela devrait faire l'affaire. Il rougit légèrement à l'idée qu'il a dépouillé un mort pour ce rendez-vous improvisé.

   Dans le bar où ils s'installent, il se souvient qu'il n'a pas d'argent mais il est soulagé que son interlocutrice paye pour eux deux sans poser de questions.

- Il y a bien longtemps que je n'ai pas été dans ce genre d'endroit. souffle-t'il en souriant.
- Vraiment? s'étonne Kate en poussant le verre de coca vers lui.
Ils trinquent et il grimace lorsque sa langue rencontre le liquide inconnu. Les bulles lui piquent les papilles et le goût trop sucré lui déplaît mais il ne dit rien. Il lit l'étiquette avec attention mais la liste d'ingrédients le laisse perplexe et il hésite à questionner sa compagne sur cette boisson inconnue qui n'est pas aussi rafraîchissante que voudrait le lui faire croire l'étiquette.

  Il la raccompagne et il se rend compte qu'il a évité la ville alors que personne ne fait attention à lui. Il a bien noté quelques regards curieux à son encontre qu'il attribue à son teint blafard mais il estime être passé relativement inaperçu.

- Le monde a changé. se dit-il. Je pourrais peut-être y trouver ma place. Il faut bien sûr que je trouve à me nourrir une fois par mois mais si j'ai réussi à trouver des cadavres frais dans le cimetière, je devrais pouvoir continuer. Le goût du sang est altéré mais je ne peux pas tuer des êtres humains sans risquer de gros ennuis. Un siècle que je me débrouille en suçant le sang de chats ou de chiens errants, de cadavres humains frais, de chauves-souris ou de rats, je peux bien continuer. Mais je ne peux pas sortir de jour ou avoir un logement normal. Et abandonner ma tombe? Ce serait un déchirement. Cette histoire n'a pas d'avenir, même si mon cœur me pousse vers elle.

  Dans un accès de douleur, il sent ses pensées s'emballer et il hurle dans la nuit.

- Je vais redevenir humain par n'importe quel moyen. J'ai enfin rencontré l'amour et je ne vais pas le perdre à peine trouvé. se jure-t'il en levant le poing vers la lune.
Les larmes aux yeux, il rejoint sa tombe car il sait que le jour ne tardera pas à se lever. Il reste prostré toute la journée en attendant le moment où il pourra sortir. Au fil des heures, il sent la folie le gagner et il hurle en silence, les lambeaux de son linceul dans la bouche pour étouffer le bruit des grognements qu'il ne peut retenir. Il regrette sa mort si jeune avant d'avoir pu vivre et il maudit le vampire qui l'a mordu. Il ferme les yeux et il se remémore l'instant où il l'a retrouvé et lui a planté un poignard dans le cœur en représailles pour sa vie gâchée.
- Je vais mettre fin à cette malédiction, je vais trouver comment faire! se promet-il en s'allongeant, les mains croisées sur la poitrine, empli d'une résolution nouvelle.
 
2020
 

vendredi 11 juin 2021

Chroniques vampirologiques Partie de chasse

- Bonjour, mademoiselle. Puis-je vous appeler Tara?
- Bien sûr. dit la jeune fille en s'asseyant dans le fauteuil moëlleux que son interlocuteur lui désigne.
La jeune blonde aux grands yeux bleus dévisage l'homme mince et pâle qui lui fait face, ses longs cheveux noirs qui pendent raides sur ses maigres épaules couvertes d'une veste élimée.
- Vous mesurez un mètre soixante-quinze centimètres pour soixante kilogrammes. Vous m'indiquez sur votre curriculum vitae que vous êtes sportive, vous mangez bio, pas de tabac, pas d'alcool. Pas de traitement médical en cours. dit l'homme en se léchant les lèvres.
Les yeux brillants, il regarde son interlocutrice qui rejette ses cheveux en arrière d'un geste nerveux, mal à l'aise sous ce regard hypnotique qui semble vouloir sonder son âme.
- Non, je suis parfaitement saine. dit-elle en souriant.
- Bien,bien. Tara, je crois que nous allons beaucoup nous apprécier. dit l'homme en se levant pour la raccompagner.
  Près de la porte, il lui tend la main pour prendre congé qu'elle prend en tremblant un peu. D'un geste brusque, l'homme l'attire à lui et lui mord le cou avant d'aspirer son sang encore chaud alors qu'elle perd lentement conscience de la vive douleur dans sa chair qui s'estompe à mesure que sa vie la quitte.
- J'ai réussi. Une fois de plus. Mais jusqu'à quand? s'interroge le vampire en ramassant ses affaires avant de traîner le corps dans le couloir.
Il est seul et il prend la jeune femme dans ses bras jusqu'à sa voiture sous laquelle il place une bombe qui explosera dans vingt minutes après y avoir jeté la puce de son téléphone portable pour ne pas être retrouvé lorsque la police épluchera les relevés téléphoniques de sa victime.

- C'est toujours plus difficile de se nourrir mais heureusement que j'ai fini par acquérir quelques compétences en informatique. Suffisamment pour recruter mes victimes et déjouer les alarmes. Reste à guetter les entreprises fermées pour congés le mois prochain lorsque sera venu le moment de me nourrir de nouveau.

  D'un pas souple, l'homme s'éloigne dans l'air du soir sa large capuche masquant son visage aux éventuelles caméras de surveillante. Il siffle un air ancien en slalommant entre les passants qui ne prennent pas garde à lui.

28112019

mardi 27 avril 2021

Alchimie de la chimie

- Pourtant, sur le plan nanomoléculaire, cela devrait fonctionner!

Seul dans son laboratoire, Grégoire sursaute et il se redresse pour regarder par la vitre le couloir désert baigné de lumière lunaire. A pas de loups, il s'approche du carreau pour inspecter les environs mais il est seul, il consulte sa montre et il soupire de soulagement. Le veilleur de nuit ne repassera pas avant deux heures. Il se rassied devant sa paillasse, ses notes étalées devant lui sur la froide porcelaine et il se replonge dans ses notes.
- Je reste persuadé que les alchimistes masquaient leur savoir par des codes secrets connus d'eux seuls.

Avec des gestes précis, il mime la manipulation avant de rassembler de nouveau ses ingrédients. Marmonnant dans la pièce vide, l'écho lui revient comme amplifié et il reste un long moment à écouter le silence qui l'entoure. Il songe qu'il a peu de temps pour effectuer sa manipulation et il se remet au travail.

- J'ai réussi, j'ai changé le plomb en or! dit-il avec enthousiasme, oubliant sa crainte d'être entendu. A moins que...
Avec inquiétude, le chimiste gratte la surface du métal et il déchante lorsqu'il se rend compte qu'il retire la fine pellicule d'or qui s'est déposée sur le petit lingot de plomb.
- J'ai atteint le niveau des alchimistes du moyen-âge, je finirais par faire mieux. songe-t'il avant de remballer son matériel avant l'arrivée de ses collègues.

24 11 2020

mardi 20 avril 2021

L'enfant des bois

Il était une fois, un enfant qui vivait seul dans une forêt oubliée de tous. Depuis qu'il était en âge de se débrouiller seuil, il vivait ainsi, isolé de ses congénères parlant aux bêtes qui ne le craignaient pas et se nourrissant de baies et de champignons. Il vivait dans un vieil arbre creux veillé par un vieux hibou qui lui chantait doucement des berceuses. Un jour, la forêt brûla et l'enfant qui ramassait du bois à la lisière de la forêt ne put qu'assister impuissant au spectacle de son logis livré aux flammes. Il quitta les lieux immédiatement, certain que son lieu de vie enchanteur et ses amis avaient tous péri par cette sèche journée d'été. En plus, il marcha longtemps jusqu'à arriver à un modeste village qui lui était inconnu, quittant rarement la forêt.

- Oh mais que voilà un bel enfant! Tu n'es pas d'ici, toi!
La femme se pencha sur lui et l'enfant plissa les sourcils car ce langage ne lui était pas inconnu. Avec difficulté, il répondit par la négative retrouvant les souvenirs de sa jeune enfance.
- Je suis perdu et sans parents.
- Viens avec moi! lui intima son interlocutrice en lui prenant la main et il se laissa faire sans crainte.

Dans la petite chaumière à l'écart du village, l'enfant s'émerveilla du spectacle qui l'entourait.
- Ta beauté est notre salut. dit la femme en s'approchant en souriant.
Elle dégaina un poignard et lui trancha la gorge en veillant à recueillir son sang dans le chaudron qu'elle venait de poser sur le foyer éteint.
- Bien, le sang d'un enfant innocent, c'est parfait. dit la sorcière en rejetant le corps sanglant loin d'elle.
Après de longues minutes à prononcer des incantations, des langues de brouillard couleur sang s'élevèrent du chaudron et s'assemblèrent au-dessus de sa tête.
- Puisse l'esprit vengeur de cet enfant, sacrifié contre son gré vous animer et se retourner contre nos ennemis! dit-elle d'une voix forte en ouvrant la porte.

Le brouillard coloré quitta la pièce et elle se retrouva seule. Elle referma la porte après s'être assurée que nul ne l'avait vue et elle entreprit de ranger la pièce, lavant ses ustensiles et enveloppant le cadavre dans une couverture épaisse. A la nuit tombée, elle sortit, l'enfant mort dans les bras et elle l'enterra dans la forêt qu'il avait tant chéri. Autour d'elle, les cadavres d'une armée prête à piller leur petit village gisait, morte.

- Ta mort n'a pas été vaine, mon petit. Une mort pour sauver des centaines de vies, ce n'est pas un prix si élevé, tu sais. Je suis profondément désolée mais si tu n'étais pas venu, j'aurais dû sacrifier un enfant du village, un enfant avec une famille, tu ne manqueras à personne. murmura-t'elle en arrivant à la lisière de la forêt. Dans un fossé, la sorcière fit une couche de feuilles mortes où elle déposé l'enfant mort avant de le recouvrir de feuilles mortes en murmurant des prières dans une langue inconnue des profanes. Elle quittait les lieux lorsqu'un grondement la fit se retourner, en alerte. Les dents du loup la mordirent à la jambe alors qu'elle tentait de fuir et elle vit les yeux des bêtes qui l'entouraient briller autour d'elle.

- Je suis perdue, je vais payer pour mes fautes. Mais le village est sauvé! songea-t'elle alors que griffes et crocs la déchiraient de toutes parts.


26112020



Exploration confinée

La soucoupe volante se pose sur l'étendue de gazon synthétique qui fut autrefois un terrain de football. Le petit homme vert descend et il s'étire après ce long voyage. Il regarde autour de lui mais tout est calme et il s'extirpe de la carcasse de métal qui l'a transporté durant un an et demie jusqu'à cette planète pour faire un rapport de la situation actuelle.

- RAS. Pas un bruit, pas âme qui vive. dit-il à l'écran qu'il tient en main. Je procède à de plus amples explorations.

  A pas lents, il sort avec précaution du terrain et il s'aventure dans les rues de la petite ville qu'il a choisie au hasard. Les rues sont vides et il regarde un chat errant se prélasser au pâle soleil d'hiver durant un long moment puis après avoir pris ses repères, il marche sur le bitume qui crisse sous ses ongles griffus qui heurtent le sol à intervalle régulier.

Dans les rues vides, il n'entend pas de cris ou de bruits de déplacement et il s'alarme.
- Où sont-ils tous passés?
Les boutiques fermées se suivent et il peine à comprendre leur fonction en étudiant les logotypes des différentes enseignes qu'il rencontre. Il plisse ses quatre yeux mais il ne parvient pas à résoudre ce mystère. Il s'approche et il voit des ornements avec des pierres brillantes qui côtoient ce qu'il identifie comme des magasins de vêtements. Tout est calme autour de lui et il lève les yeux vers les fenêtres des immeubles où il devine des lumières allumées.
- J'ai compris, ils sont tous chez eux. A l'abri d'une menace. Je dois annuler la mission d'exploration. Quel poisse!

A pas lents, le martien rejoint son vaisseau, il décolle rapidement, dépité d'avoir perdu son temps.

18112020

Les moines de Beaulieu

- Vous dites avoir vu des fantômes en ce lieu?

Crayon en main, carnet de notes sur les genoux, l'enquêteur fait démarrer son dictaphone pour ne rien perdre du témoignage.
- Oui, j'étais avec mon fiancé de l'époque. dit la très vieille femme qui lui fait signe. Nous nous sommes assis dans l'herbe non loin de l'abbaye. Nous étions seuls ce qui n'arrivait pas souvent et nous avons commencé à nous dire des mots d'amour avant de nous embrasser. Nous avons été arrachés l'un à l'autre par une force inconnue qui nous a tirés en arrière.
- Vous pensez que c'était une force d'homme?
- Je l'ignore sur le moment, elle m'a semblée surhumaine mais la peur peut déformer les sensations, vous imaginez bien combien nous étions terrorisés.
- Et ensuite? poursuit le journaliste en se perdant dans les yeux délavés de la retraitée qui lui fait face.
- Nous nous tenions par la main alors nous avons tenté de nous rapprocher l'un de l'autre mais cela n'a pas fonctionné. Mon fiancé a été éjecté à cinq ou six mètres de moi. J'ai hurlé de frayeur mais vous imaginez bien que vous avions choisi ce lieu pour ne pas être dérangés. Mon fiancé n'arrivait pas à se dépêtrer de la force qui le maintenait loin de moi. Alors nous avons commencé à nous éloigner de l'abbaye et la force maléfique a relâché son étreinte. Nous avons rejoint notre voiture et nous sommes restés stationnés quelques secondres emplis de la crainte d'avoir été suivi mais nous étions seuls. Nous sommes rentrés sans dire un mot et nous n'en avons plus jamais reparlé. Nous nous sommes séparés un an plus tard et qui sait quel rôle a joué cette rencontre. 
 - Je veux dire qu'après cette expérience, nous n'avons plus vu la vie de la même façon. J'ai eu peur des choses invisibles qui nous entourent. J'ai changé ma manière de voir la vie, il me semble. continue la femme en souriant au journaliste.  

- Merci beaucoup. Vous m'avez aidé à avancer dans mon enquête.

Le cœur serré, il quitte la petite maison avant de remonter dans sa voiture vers son bureau. Dans la pièce éclairée pour une vieille ampoule, il sort une liasse de documents d'un tiroir et il se met au travail. - Donc nous avons la chapelle de Beaulieu utilisée de 1204 à 1538. Ensuite, les gens des environs sont certains que les moines sont restés en ce lieu et ce jusqu'à aujourd'hui; des histoires ont alors commencé à circuler racontées lors des veillées ou de bouche à oreille. Mais les témoignages que j'ai trouvé sont somme toute plutôt récent. dit-il à haute voix pour pousser sa réflexion. Puis, il consulte ses notes" 1943 unité anti-aérienne en mission spéciale. Une nuit, les officiers établissent un plan de campagne sous une tente à proximité de l'abbaye. Un souffle fort se répand dans le campement. On pense à une tornade, c'est l'été et il n'y avait pas de vent. Quelques hommes sortent à l'extérieur de la tente: les feuilles des arbres volent, leurs branches s'agitent mais ils ne ressentent aucun souffe de vent sur leur peau. Peu après, quelques moines quittent la chapelle alors qu'il n'y a normalement personne. Le colonel les hèle mais ils ne réagissent pas et ne répondent pas. Un capitaine court alors vers eux pour leur parler mais il les traverse. Tous sont convaincus d'avoir affaire à des spectres même si personne dans leur groupe n'y croit. Ils sont en train d'évoquer un mirage même si les conditions ne sont pas réunies mais cela leur semble la seule explication plausible, lorsqu'un des moines quitte le groupe et se dirige vers eux. Il leur semble que c'est le père supérieur et il s'arrête juste à côté d'eux. - Une attaque aérienne va avoir lieu dans la région. dit-il. Il s'évanouit et ils se retrouvent seuls. Quarante-huit heures plus tard, des avions appartenant à la Luftwaffe survolent les lieux. "

"1951, peu avant noël, Mickael Sedgwick, directeur de recherches au musée de l'automobile de l'abbaye de Beaulieu travaille dans son bureau. Ce n'est pas inhabituel, il travaille souvent de nuit en enchaînant les cigarettes. Il ouvre la fenêtre afin de chasser la fumée et il entend des chants religieux. Il tend l'oreille et il reconnaît des chants catholiques non loin de l'endroit où il se trouve. Une musique douce, des voix mélodieuses lui arrivent avec irrégularités. Il cherche à les capter sur son poste de radio pour mieux entendre mais il ne trouve pas les chants qu'il recherche. Il comprend alors qu'il entend des chanteurs bien réels. Ce soir-là, l'intendante de l'abbaye, Bertha Day qui se trouve à deux kilomètres entend également les chants. Elle se dit qu'ils sont chantés pour le repos de l'âme de sa voisine, madame Mearse qui vient de trépasser. Elle finit par apprendre que le corps a déjà été enlevé et qu'il ne peut donc s'agir de chants funèbres. Alertée, la police cherche à retrouver les squatteurs mais ils ne trouvent ni moine ni squatteur dans le bâtiment. Le révérent père Robert Fraser Powles leur apprend alors qu'il sait que des fantômes de moines habitent l'endroit. Il dit avoir de bonnes relations avec eux, connaître le nom de plusieurs d'entre eux et même en tutoyer. Ces hommes sont morts au début du XVIème siècle et ils reviennent célébrer une messe chaque noël dans l'église du village.

Un fidèle a vent de ces propos et lui fait remarquer que peu de monde se rend à la messe de minuit. Le révrend en ce 24 décembre 1958, lui répond "Il y en a beaucoup plus que vous ne voyez!" Immédiatement, des choeurs se mettent à chanter dans l'église.

En 1965,l'actrice Margaret Rutherford se promène dans la région lorsqu'elle rencontre un moine vêtu d'une robe marron qui lit dans le cloître en ruines, appuyé contre un mur. Elle hèle un paysan qui travaille dans son champ juste à côté et elle photographie l'homme d'église qui n'apparaît pas sur les photographies une fois celles-ci développées.

Puis en 1979, les moines refont surface. Un témoin dit avoir vu un moine tailler la vigne qui venait d'être replantée peu avant.

17 11 2020

vendredi 16 avril 2021

Gloomy sunday

- Tiens, il faut que je te fasse écouter un truc sur mon baladeur, tu viens?

Hésitant, le jeune garçon met ses mains dans ses poches avant de se lever. Il se tourne vers sa petite amie qui pianote sur son téléphone portable, en grande conversation avec sa meilleure amie. 
- Hannah, je te parle! s'énerve-t'il en jetant un coup d'oeil à l'horloge.
- Quoi? Tu ne vois pas que je suis en grande conversation? dit la jeune fille en dardant sur lui ses yeux bleus.
- Mes parents ne vont pas tarder à rentrer, viens dans ma chambre, j'ai une surprise pour toi.
La jeune fille soupire avant de se résigner à se lever pour le suivre dans les étroits escaliers. Arrivée dans la chambre de son petit ami, elle croise les bras sur sa poitrine debout près de la porte.
- Je ne dois pas rentrer trop tard, mes parents vont s'inquiéter. dit-elle en s'adossant à la porte qui se referme sous son poids.
- J'en ai pour une minute, tu connais cette chanson? Elle s'appelle Gloomy sunday.
La jeune fille soupire et elle se force à sourire.
- C'est de qui?
- Rezső Seress , un compositeur hongrois.
- De quel siècle cette fois-ci? Laisse-moi deviner... Dix-sept ou dix-huitième? Ou avant? dit-elle, méprisante.
Les poings serrés, Lucas hésite mais sa remarque le décide à agir.
- La musique classique n'est pas ringarde, elle est juste...ancienne. Tu n'as pas à te moquer de mes goûts! Ecoute, maintenant...
La musique emplit la chambre et Lucas s'approche de la fenêtre pour regarder au-dehors. La joue contre la vitre froide, il surveille la rue mais nulle voiture ne s'arrête devant la petite maison de ville qu'il habite; ses parents et sa petite sœur sont à l'abri. Le morceau s'étire dans l'air et il serre les poings plus fort avant de jeter un coup d'oeil à sa petite amie qui ne masque pas son impatience.
- Elle l'a mérité, elle est condescendante avec tout le monde, une vraie peste qui cache bien son jeu. Une hypocrite qui répandra le mal autour d'elle, je sauve la vie émotionnelle de nombreuses personnes en agissant ainsi. songe le jeune garçon pour se donner bonne conscience.
- Alors? C'est enfin fini? dit la jeune fille en se dirigeant vers la porte de la chambre. Je dois vraiment rentrer.
- Je sais. dit Lucas avec un sourire crispé. Au revoir! lance-t'il froidement mais sa petite amie ne remarque rien.
Il la raccompagne et il la suit du regard jusqu'à ce qu'elle disparaisse de son champ de vision. Puis il se laisse glisser à terre et il reste assis sur le carrelage, prenant conscience de ce qu'il vient de faire.
- Dans trois jours, elle va se suicider sauf si je lui dis de faire écouter cette chanson maudite à quelqu'un d'autre. Mérite-t'elle la mort? Si jeune? Parce qu'elle est méchante et hypocrite? Non, je ne dirai rien, je vivrai avec ce meurtre.

12/11/2020

La sorcière du village 26

26 Ils trouvent que vous en savez trop et ils décident de fouiller la maison de fond en combles. Allez en  11.

La sorcière du village 25

25 Les habitants ont eu vent de ce qui s'est passé et ils vous soupçonnent. Votre sac est fouillé, on trouve votre grimoire. Allez en  11.

La sorcière du village 24

24 Vous trouvez un emploi comme vendeuse et vous pratiquez en cachette pour vous seule. Vous garderez le secret désormais sans vous mêler des affaires des autres. FIN

La sorcière du village 23

23 Suspicieux, ils vous accompagnent jusqu'au couvent où ils vous confient au soin des sœurs. Vous décidez de vous échapper coûte que coûte, allez en  14. Vous vous résignez, vous serez à l'abri, nourrie, logée et vous pourrez garder vos croyances au plus profond de votre âme. Allez en 17. Vous décidez de tenter de convaincre vos compagnons de route en chemin. Allez en 20. Vous décidez de faire semblant d'être une sainte envoyée sur Terre pour purifier les hommes de leurs péchés. Allez en 16.

La sorcière du village 22

22 Je finis par me lever alors que la nuit est tombée et je marche toute la nuit, au hasard. Je me trouve dans une grande ville et je soupire de soulagement. Allez en 24.

La sorcière du village 21

21 Une fée vous annonce qu'ils ont décidé de partir en exil le lendemain matin et vous partez avec eux. FIN

La sorcière du village 20

20 Vos arguments confirment leurs soupçons, allez en 11.

La sorcière du village 19

19 Au matin, vous êtes seule, le petit peuple a disparu. FIN

La sorcière du village 18

Vous construisez une cabane dans un lieu isolé et vous rencontrez le petit peuple. Désormais, vous vivrez loin des hommes, libre mais solitaire. Vous décidez de leur faire confiance et nouer une amitié avec lui, allez en  21. Vous ne dévoilez pas vos pratiques aux nains, fées et autres créatures de crainte d'être dénoncée ou d'attirer l'attention d'un promeneur. Vous prétendez être un ermite à la recherche de la sagesse. Allez en 19.

La sorcière du village 17

17 Vous vous abîmez en prières, récitez ce qu'on vous dit de réciter, apprenez par cœur ce qu'on vous dit d'apprendre mais vous continuez à prier vos dieux dans votre cœur, retirée du monde. Vous pratiquez des rituels simples qui ne prêtent pas à questionnement. FIN

La sorcière du village 16

- Arrêtez, vous ne savez pas ce que vous faites! Le seigneur m'est apparu il y a plusieurs semaines pour me charger d'une mission, ramener les brebis égarées en son sein mais il m'a aussi rappelé que je devais connaître mon ennemi pour mieux le convaincre.

Les bras croisés, je regarde mes interlocuteurs qui hésitent un moment.

- Nous verrons bien vite si c'est une ruse. La question devrait te décider à dire la vérité.

Je grimace et je sais que j'ai peu de chances d'en réchapper. Je prends la fuite à travers bois et je me cache dans un épais buisson après avoir lancé une pierre au loin pour simuler ma présence. Le cœur battant, je vois la troupe me dépasser et je rejoins le chemin rapidement avant de couper à travers champs et me réfugier dans le premier fossé qui se présente. Mais je ne sais où aller et j'attends, le cœur battant. Allez en  22.

La sorcière du village 15

Vous jouez les simples d'esprit et leur faites répéter les questions que vous faites mine de ne pas comprendre, vous répondez à côté de manière systématique. Ils décident de fouiller la maison. Allez en 11.

La sorcière du village 14

Une semaine après votre arrivée, vous profitez de la nuit pour vous échapper. Mais la mère supérieure a été mise en garde et vous êtes arrêtée. Allez en  11.

La sorcière du village 13

Béatrice vous avoue sa peur mais elle doit sortir nourrir les poules. Elle vous dit de l'attendre, elle en a pour une minute. Allez en 10.

La sorcière du village 12

Les inquisiteurs s'interrogent et vous font passer un entretien pour connaître vos motivations et vous font réciter l'évangile que vous connaissez mal. Vous allez à la messe le dimanche, avez fait votre catéchisme et c'est à peu près tout. Ils vous emmènent avec eux et vous torturent. Après une nuit de souffrance, vous décidez d'abréger vos tourments et d'avouer, allez en 11. Vous tenez bon avec le secret espoir de vous échapper, allez en  23.

La sorcière du village 11

Après un rapide procès, vous êtes condamnée au bûcher. FIN

La sorcière du village 9

Vous ne dites rien, buvez une tisane en guettant du coin de l'oeil le départ des inquisiteurs. Allez en 13.

La sorcière du village 10

Béatrice vous dénonce, elle a versé un somnifère dans la tisane qu'elle vous a servie, vous n'avez d'autre choix que de vous rendre. Allez en 11.

La sorcière du village 8

Vous suivez le ruisseau pour avoir de l'eau après avoir rempli votre gourde et vous vous enfoncez dans la forêt. Vous décidez de vous arrêter dans le premier village que vous rencontrez sur votre route, allez en 25. Dans la première ville, allez en  14. De vivre dans la forêt en ermite, allez en 18.

La sorcière du village 7

Les inquisiteurs fouillent la maison de fond en combles et trouvent vos fioles, grimoires et herbes séchées. Vous décidez de répondre à leurs questions du mieux que vous pouvez sans vous dévoiler pour les rassurer. Allez en  26. Vous jouez la simple d'esprit pour les décourager. Allez en 15.

La sorcière du village 5

Béatrice trouve cela étrange et elle vous dénonce. Allez en  11.

La sorcière du village 6

Arrivée chez Béatrice, vous hésitez. Vous lui mentez et dites que vous avez peur de l'Inquisition et que vous venez prier qu'ils mènent leur mission à bien. Allez en 5 si vous lui avouez la vérité et en 9 si vous ne lui dites rien.

La sorcière du village 4

4 Vous vous réfugiez chez votre amie Béatrice sans vous faire voir et vous lui avouez la vérité. Vous êtes amies depuis l'enfance, elle vous cachera. Allez en  6.

La sorcière du village 3

3 Vous jetez votre grimoire dans un sac avec quelques vêtements, une gourde, un poignard et des provisions puis vous sortez par la porte de derrière et vous enfoncez dans la forêt. Allez en  8.


La sorcière du village 2

2 Vite, vous jetez pêle-mêle dans la trappe ce que contient votre laboratoire. Vous avez fait cet exercice à de nombreuses reprises et cela ne vous prend qu'un instant. Vous replacez le lit dessus et vous attendez. Allez en  7.

La sorcière du village 1

1 Vous vivez dans un petit village et vous pratiquez votre art en cachette. Vous glissez un sort ici et là pour aider ou punir quelqu'un mais vous restez discrète. Un jour, l'Inquisition fait son entrée dans le village. Vous:

- Rangez vos fioles, grimoires et les cachez dans un trou creusé dans le sol, allez en 2.

- Rassemblez quelques affaires et décidez de quitter le village en priant que personne ne vous voit. Allez en 3.

- Courez vous cacher chez votre amie Béatrice que vous connaissez depuis toujours à qui vous avouerez votre secret. Elle vous cachera dans le tas de paille de la grange parmi ses vaches, le temps que les inquisiteurs fouillent votre demeure, allez en 4.

- Jetez quelques affaires dans un sac et vous sortez en prétextant que vous entrez au couvent. L'arrivée de l'inquisition vous a fait comprendre que ce monde est impur et que vous voulez prier pour le salut des hommes. Allez en  12.

mardi 13 avril 2021

Athénadore

- Je vous souhaite un heureux séjour en ce lieu!

Je salue le portefaix et je récupère mes bagages avant de frapper à la porte de la demeure.
- Bonjour, vous êtes le locataire de la villa Athénadore? Tenez, voici les clés mais prenez garde, prenez garde! Et maintenant, partez!
La femme me tend les clés et me claque la porte au nez; surpris, je tambourine à la porte mais je ne reçois nulle réponse et je me dirige vers la grande bâtisse que je reconnais pour l'avoir vue en photographie. La grille rouillée grince lorsque je l'ouvre et je remarque que le jardin est envahi par les herbes folles mais je n'en ai cure, je ne pensais pas que la maison et ses alentours aient été entretenus avec amour depuis toutes ces années et je me hâte de me réfugier dans la maison, reclus de fatigue par mon long voyage.

   La porte de bois vemoulu crie sous ma main mais j'ignore ses protestations pour ouvrir plus grand. Une odeur de moisi et d'humidité atteint mes narines alors que je pénètre dans la maison. Surpris de ne pas me trouver face à une ruine, je comprends que le 'propriétaire l'a faite rénover et je me sens mieux à cette pensée. Le jour commence à tomber alors que j'achève de ranger mes provisions et je ne peux m'empêcher de songer à la légende locale qui veut que la maladie ou la mort touche ceux qui demeurent dans la maison après le crépuscule. Et la folie frappe les autres. Je jette un regard alentour mais je ne vois rien d'étrange aussi je commence à préparer mon dîner en chantonnant, dans l'espoir que cette vie nouvelle en ce lieu en chasse les démons.

  Seul dans la salle à manger, attablé devant des pâtes au fromage, je me sens observé mais chaque fois que je me retourne, je ne vois rien. Un bruit de chaînes qui s'entrechoquent me fait sursauter et je bondis de ma chaise pour me précipiter dans le couloir où je ne vois rien. Mais le bruit se rapproche et je gémis de peur lorsque je vois l'affreux vieillard décharné qui vient à ma rencontre. Il tortille sa longue barbe blanche emmêlée tandis que ses cheveux ébourrifés semblent s'agiter au rythme de ses pas.

- Je croyais que le fantôme avait été enseveli! dis-je dans un cri.
- Oui mais il faut refermer ma tombe! répond le vieillard dans un gémissement en agitant les chaînes qui enserrent ses poignets avant de lever les bras en l'air pour faire tinter ses liens de métal.
- D'accord! Je ferai ce que vous voudrez si vous partez. bredouillais-je avant de me forcer à m'approcher.
 
  Le fantôme me mène dans le jardin et je le suis en tremblant de peur jusqu'à ce qu'il me désigne un bosquet et ce qui me sembla un talus. Je m'agenouille et à tâtons, je tente de reconnaître ce qui m'entoure jusqu'à ce que je sente un os sous ma main. Sans réfléchir, je plonge mes mains dans la terre meuble et j'en recouvre l'os et les alentours dans l'espoir de contenter le fantôme. Je tremble de peur et je n'ose pas me retourner de crainte de perdre la raison. En tremblant, je me relève et je regarde autour de moi mais je ne vois rien et les bruits ont cessé. Avec soulagement, je rejoins la maison, je sais que je serai incapable de m'endormir mais j'ai beau tourner mes regards alentour, je ne remarque rien d'anormal.

- J'ai peut-être apaisé le fantôme en fin de compte. me dis-je en passant par la porte restée ouverte.


12/11/2020

lundi 12 avril 2021

Glanis

- Alexia! Je te laisse fermer, je dois y aller, j'ai un rendez-vous!

La jeune stagiaire acquiesce et elle continue à mettre de l'ordre dans la chapelle. Elle recompte les sièges avec soin.
- Il y en a bien quarante-six, tout est en ordre. dit la jeune fille dans un soupir. Dont le siège de la dame grise.
Alors qu'elle referme la porte, elle songe à Janet Douglas . Elle se demande si elle aurait également avoué son statut de sorcière sous la torture en sachant que le bûcher l'attendait.

   Elle quitte le château lorsqu'un bruit la fait se retourner vers la grande bâtisse. Inquiète, elle scrute l'obscurité mais elle ne voit rien lorsqu'un mouvement attire son regard. Elle remarque une jeune fille accrochée à une fenêtre mais alors qu'elle s'approche, celle-ci disparaît.

- Ces vieilles légendes te font tourner la tête! Rentre donc te coucher.

  La nuit venu, elle se retrouve en train de suivre un long couloir éclairée par une bougie. Un homme est penché sur un jeune garçon qui l'écoute avec attention.

- Mon fils, te voilà majeur, tu es mon héritier. Il existe une pièce secrète où le cadavre de lady Janet Douglas est enfermé, cette pièce qui se trouve derrière la grande cheminée de la grande salle ne doit jamais être ouverte ou notre famille mourra jusqu'au dernier dans la nuit qui suivra. Elle a été accusée de sorcellerie mais on dit qu'elle avait comploté contre le roi James V d'Ecosse et que comme il n'y avait pas de preuves, on l'a accusée de sorcellerie.
- Père, le fantôme que j'ai vu courir dans l'herbe par une nuit d'été, hurlant en silence...
- Oui, c'est une servante qui a menacé d'éventer le secret, le comte lui a ôté la langue mais elle a fui dans le parc où elle a été attrappée et tuée. Il y a une autre pièce secrète dans la cave où un de nos ancêtres a enfermé le clan Ogilvy pour fuir une querelle avec le clan Lindsay. Il les y a abandonnés jusqu'à ce qu'un serviteur entre par erreur dans la pièce et trouve le surviant qui avait dû manger les membres de sa famille pour ne pas mourir.
- Le monstre?
- Non, au XIX ème siècle, l'un des fils du comte qui était difforme a été enfermé pour qu'il y reste caché pour épargner la honte à notre famille. Il n'avait le droit de sortir sur le tout que la nuit pour prendre l'air mais malgré toutes ces précautions, les villageois le voyaient souvent lorsqu'il était là-haut. On l'appelait le monstre de Glannis.
- Une nuit, j'ai vu Earl Beardie, le chevalier en armure et en armes, il s'est penché sur mon lit. Il a perdu son âme au jeu avec le diable et il était cruel, on l'entend encore la nuit dire des choses obscènes en faisant cliqueter ses dés dans sa main, il ne m'a pas fait de mal mais il m'a fait une peur bleue.
- Je le sais mais c'est là notre héritage, nous devons le préserver.

05112020

La carotte ensorcelée

La neige fait rage et l'homme emmitoufflé dans son long manteau lutte pour retrouver son chemin.

- Comment ai-je fait mon compte pour me perde ainsi? s'interroge-t'il en essayant de s'orienter.
Il sait qu'il doit se mettre au chaud rapidement et que son manteau ne le protégera pas longtemps du froid qui commence à s'immiscer en lui. Sa survie en dépend.
Il s'enfonce sous des arbres aux branches dénudées qui le protègent un peu de la neige. Il s'arrête un instant pour reprendre son souffle et il remarque une carotte posée au pied d'un arbre. La faim lui tord le ventre et après l'avoir inspectée et jugée intacte, il croque dedans.

- Et si elle avait été empoisonnée? se demande-t'il en proie à la peur. On ne pose pas une carotte au pied d'un arbre sans raison! Une carotte lavée, débarassée de ses fânes et pas mangée. Comme si on venait de l'acheter au supermarché du coin. On a peut-être voulu tuer un lapin. Mais pourquoi vouloir empoisonner un lapin?

Inquiet, il écoute son cœur battre et il respire lentement. Au bout de quelques minutes, il ne remarque rien et il rit de ses inquiétudes.
- Qui irait empoisonner une carotte? Elle a dû tomber du sac d'un promeneur et quelqu'un l'a adossée à cet arbre.

Il reprend sa marche à la recherche d'un abri. Il ne trouve que le creux d'un rocher et il hésite mais il craint de se perdre dans cette forêt et il sent la fatigue le gagner. Bientôt, l'homme se pelotonne au pied de l'arbre et il sent le froid l'engourdir lentement alors qu'il s'endort, épuisé.

- Je ne dois pas dormir, je pourrais mourir. La nature a toujours raison, elle est plus forte que l'homme, elle le sera toujours. songe-t'il alors que le sommeil l'engloutit.

- Où suis-je donc? se demande-t'il en se réveillant dans un hôpital inconnu.
Il regarde dehors et il remarque que le soleil est haut et brillant, il entend les oiseaux chanter sans comprendre ce qui se passe. Il se lève avec précaution et il cherche ses vêtements dans le placard de la petite chambre. Après s'être lavé dans la minuscule douche et s'être rhabillé, il ouvre la porte pour se retrouver dans un couloir.
- Chambre 227. note-t'il mentalement en s'aventurant dans le couloir d'un hôpital. J'aurais dû appuyer sur la sonnette, tout simplement. songe-t'il alors qu'un infirmier passe près de lui.
- Excusez-moi!
- Le patient de la 227, vous vous êtes réveillé? Enfin!
- Oui, j'ai dormi longtemps?
- Six mois. Jour pour jour.
- Je vous demande pardon ?
- Vous avez dormi six mois. On vous a nourri par perfusion au début mais nous nous sommes rendu compte que vous n'aviez pas besoin d'eau ou de nourriture, vous dormiez tout simplement, vous rêviez. Vous savez que vous êtes célébre? On a fait des articles sur vous.
- Ma famille?
- Votre famille vient de temps en temps mais vous savez comme vous dormez et ne sembliez pas en danger... Que vous est-il arrivé?
Je cherche dans mes souvenirs avant de répondre.
- Je marchais dans la forêt lorsque j'ai vu une carotte posée au pied d'un arbre. Simplement posée à m'attendre. Il neigeait, j'avais faim, elle m'a semblé saine, je l'ai mangée.
- Je ne vois pas quel poison vous plongerait dans le sommeil durant six mois. dit le jeune homme, soucieux. On a cherché, croyez-moi mais nous n'avosn rien trouvé.
- J'ai rêvé, une sorcière aurait ensorcelé cette carotte et l'aurait perdue en chemin. Je l'ai vue la préparer, elle voulait empoisonner l'homme qui l'avait quittée. Avez-vous eu des cas similaires?
- Non, mais il est vrai qu'un homme est entré dans nos services peu après votre arrivée. Empoisonné par une substance inconnue, nous avons conclu à un suicide, faute de preuves. Il avait mangé une pomme empoisonnée.
- Pourquoi suis-je en vie et pas lui?
- Je n'en ai aucune idée, peut-être que c'était un test mais réjouissez-vous d'être encore parmi nous.

24/07/2020

Disparition volontaire

Je ferme ma valise après l'avoir inspectée durant de longues minutes. J'entends ma petite amie dans la pièce d'à côté et je me hâte de cacher mon bagage sous le lit. Je la rejoins dans la cuisine alors qu'elle prépare le dîner et je me serre contre elle un moment, respirant son parfum. Fleur de jasmin et rose, je n'ai jamais réussi à me souvenir du nom de son parfum qui coûte une fortune.
- Tout va bien? 
- Oui, tout va bien. dis-je en prenant le saladier qu'elle me tend.
Après un repas silencieux animé par le bruit de la télévision, je songe que c'est mon dernier repas en ce lieu.

  Deux heures après que nous nous soyons couchés, je fais glisser ma valise sur la moquette blanche de la chambre et je l'empoigne avec fermeté avant de quitter la chambre. Dans le petit couloir étroit, j'écoute mais tout est silencieux, elle dort, insouciante et loin de se douter de ce que j'ai décidé de faire. Je sors sans bruit de l'appartement que je ne ferme pas à clé pour ne pas l'éveiller puis en chaussettes, je descends les escaliers. Un étage, deux étages. Je m'arrête pour écouter mais tout n'est que silence, elle ne s'est pas réveillée apparemment. Je crains de croiser un voisin mais il n'en est rien en cette heure tardive et je rejoins le parking où je prends la voiture. Je conduis jusqu'à la gare et je prends un billet par le premier train en prenant soin d'éviter les caméras et de garder la tête baissée face au guichetier à qui je tends mes billets de banque.

  Je cours pour monter dans le train qui m'emménera vers une destination inconnue après avoir retiré le maximum possible sur mon compte bancaire. Je ne supporte plus ma vie et je décide de la fuir par le premier train. Je me réveille alors que le train arrive au terminus, je descends en pleine campagne et je me demande où je me trouve. Je regarde autour de moi, le nom de la gare ne me dit rien et je hausse les épaules avant de prendre la première rue qui s'offre à moi. Je marche au hasard tout en me disant que je n'ai rien à manger. L'aube se lève à peine et j'imagine Laure qui s'éveillera dans deux ou trois heures, constatant ma disparition. Aussi, je décide de chercher un lieu où je pourrais trouver de quoi m'abriter et manger. Je m'enfonce dans un petit bois et je décide que c'est la meilleure solution pour disparaître. Si je reste loin des chemins, je pourrais facilement passer inaperçu. Et je trouverais de quoi me nourrir et où me loger.

   Je voulais juste échapper à ma vie, je crois. Ma vie monotone, le travail, une petite amie, pas de temps de vivre pour moi. J'ai seulement voulu fuir. J'ignore quand et si je reviendrai mais peu importe, quoi que je fasse, ma vie ne sera plus jamais la même.

23/07/2020

Journal d'un scientifique fou

Cher journal,

Cette nuit, je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. Cette idée m'a trotté dans la tête à peine la tête posée sur l'oreiller. Il faut dire que j'ai relu Frankenstein il y a peu. C'est mon livre préféré d'ailleurs. Surtout le moment où le docteur Frankenstein fabrique la créature. Quand il explique comment il s'est fourni en matériel et comment il les a assemblés avant de lui donner vie. Je voudrais faire la même chose. J'ai essayé bien sûr. Sur des animaux errants; sans succès. Et tout ce sang, je passe un temps infini à nettoyer après mes expériences. La jonction entre les carreaux de mon carrelage s'est coloré de marron et je n'ai jamais réussi à la nettoyer correctement malgré toutes mes tentatives. Ma salle de bain me fait parfois l'effet d'une boucherie, je vois le sang qui a giclé partout alentour, j'imagine les taches se colorer sous mes yeux et je frémis à cet idée.

Le plus dur est de me fournir en matière fraiche mais il y a suffisamment d'animaux errants pour trouver ce dont j'ai besoin avec un peu de patience. Je prends les meilleurs morceaux pour obtenir l'animal parfait même si le mélange de pelages poils de couleur et de longeur différents rend la chose parfois inesthétique. Mais sous la fourrure et la peau, je sais que j'ai l'animal de compagnie parfait. Le plus difficile à choisi r est le cerveau et je me fie à mon instinct pour faire ce choix crucial. L'électricité est abondante de nos jours et augumenter son intensité n'est pas un souci. J'ai voulu mélanger l'agilité du chat et l'intelligence ainsi que la fidélité du chien à la multitude de possibilité qu'offre le chimpanzé. L'arrière d'un chat, les bras d'un chimpanzé volé à un zoo et une tête de chien composent mon œuvre. Ce soir, j'ai tenté de lui donner vie et j'ai échoué. J'ai passé des heures penché sur mon carnet à lire et relire mon expérimentation pour trouver la faille.

Mais j'ai compris pourquoi ça ne fonctionne jamais. Le matériau est la clef. Or, le docteur Frankenstein a créé la créature à partir de cadavres frais d'êtres humains. Me fournir ne sera pas facile, j'ai hésité à acheter un grand congélateur mais comme le froid fait éclater les cellules, je préfère éviter pour l'instant. Pour une deuxième tentative, je tenterai la congélation. Sinon, il me faudra me fournir en viande de meilleure qualité et plus fraîche... Reste à trouver des donneurs.

23/07/2020


dimanche 11 avril 2021

Descente aux enfers

- Encore une sale journée qui commence! claironne Gustave dans sa salle de bain, face au miroir qu'il évite du regard.

  A pas lents, il se dirige vers la cuisine où il se sert dans le réfrigérateur avant de s'affaler dans le vieux canapé défoncé, sa mixture rouge vif à la main. D'un geste las, il prend la télécommande pour allumer la télévision qu'il regarde d'un œil inexpressif.

- Il n'est même pas midi et je ne peux pas sortir! marmonne-t'il en engloutissant son repas. Entre le confinement, le jour, mon nouveau statut de vampire et mon insomnie, je suis servi! Reste à savoir ce que je vais bien pouvoir mettre sur mon attestation pour aller me nourrir et me réapprovisionner en sang frais. Le sang du boucher, ça dépanne mais ça ne satisfait en rien les papilles. Et la nourriture humaine n'a plus de saveur. C'est plus une habitude qu'autre chose. En même temps, c'est sans doute une punition divine pour être sorti dans le jardin en pleine nuit pour prendre l'air. Et si au moins, ce vampire m'avait tué mais non, il a eu la cruauté de me laisser la vie.

  Pensif, il regarde par la fenêtre aux rideaux fermés et il imagine la vie au dehors avant de se remettre à regarder son feuilleton en rêvant à une vie normale. 

2020 

Humanité

- Et maintenant des nouvelles d'Humanité! Le vaillant robot qui nous a ramené des clichés nets et en couleur de la planète Mars est sur le retour vers notre planète avec des échantillons de grande valeur car venant d'une région inexplorée de la planète rouge. Et pour refermer ce journal, un point sur les vacanciers qui se pressent...

Colline éteint la télévision et après avoir rangé la vaisselle qui attend sur l'égouttoir du coin cuisine de son minuscule studio, elle se glisse dans son lit où elle s'endort.

A quelques kilomètres de là, dans le laboratoire, Victor, jeune scientifique rattaché à l'agence spatiale européenne nettoie soigneusement le robot tout juste rentré de la mission scientifique sur la planète Mars. Avec délicatesse, il passe un jet d'eau sur l'appareil avant de racler le sol pour s'assurer que tout le liquide de nettoyage est évacué dans les égouts via la grille placée au centre de la pièce légèrement en pente.

- J'ai terminé! Enfin! hurle-t'il à la cantonade. Bonne nuit, je rentre chez moi. achève le quadragénaire en faisant un signe de la main à la ronde.

Il écoute à peine les réponses de ses collègues en se défaisant de sa combinaison qu'il met au nettoyage. Puis il rejoint le parking en sifflotant.

Il ne sait pas qu'un grain de sable martien s'est détaché du recoin du véhicule d'exploration où il s'était coincé, que ce minéral a rejoint les égouts puis la mer.

Le grain de sable extraterrestre rencontre l'eau salé et sa structure moléculaire change, se mêlant aux atomes terrestres. Il commence à libérer une toxine qui sort de son sommeil et qui se multiplierdans l'eau de mer. Au gré des courants, elle colonise le monde entier et elle modifie le pH de l'océan qui s'acidifie un peu plus chaque jour; en quelques jours, elle a pris possession de la Terre et de ses océans sans que personne ne le remarque à la surface. Coraux, algues, poissons, plancton meurent en quelques mois. Partout des laboratoires analysent l'eau mais ne sachant quoi chercher, ils ne trouvent pas la toxine qui continue à se répandre sur la planète en pénétrant dans les nappes phréatiques où elle se multiplie de nouveau au contact de l'eau douce cette fois-ci, empoisonnant l'eau, les animaux terrestres et les êtres humains.

Colline se penche pour examiner l'écran de son appareil photographique numérique et elle regarde la mer, interloquée. Elle s'agenouille et elle examine le fond de l'eau et la plage pour se convaincre de ce qu'elle a vu.

- Bonjour, je suis Colline, je photographais sur la plage des Ombellines et tout est mort, je crois. Je ne sais pas qui appeler.
Au bout de la ligne, le policier fait la moue et il lui répond qu'il s'en occupe avant de soupirer.

- Encore un souci avec l'usine, je crois. Jacques, c'est pour toi, cette fois-ci.

Lorsque le policier arrive à la plage, il écarquille les yeux de surprise.

- Que se passe-t'il?

- Je l'ignore, c'est pour cette raison que je vous ai contactés. dit la femme en souriant.

- D'accord, je crois que je vois, je prends ça en charge. Rentrez chez vous, et pas un mot.

La jeune femme salue et elle rentre chez elle, perplexe. Elle passe la soirée à faire des recherches sans rien trouver.

Le lendemain, elle revient sur les lieux et elle remarque une armée de scientifiques en combinaison blanche, masqués et gantés qui effectuent des prélèvements dans l'eau et sur la plage. Elle s'inquiète d'avoir attrappé un agent pathogène mais elle se rassure, les policiers ont certainement son numéro de téléphone suite à son appel.

Au fil des jours, des informations relayent des nouvelles parlant de morts mystérieuses suite à une maladie respiratoire et de germes dans l'eau de mer qui ont été identifiés un peu partout dans l'eau douce comme salée. Un laboratoire isole l'agent pathogène qui est inconnu et qui résiste aux principaux tueurs de germes, condamnant la vie terrester à court terme.

Colline continue de prendre ses photographies qu'elle développe elle-même chaque jour avant de le annoter avec soin.

- Nous allons tous mourir mais je veux laisser mon témoignage. songe-t'elle en refermant le cahier où elle a rangé les photographies. Elle fixe la carte mémoire dont elle a pris soin de transférer les documents via un service en ligne avec de la colle. Elle referme le carnet qu'elle met bien en évidence.

Puis elle approche une fiole de ses lèvres et elle s'allonge sur son lit avant de boire son contenu. Elle s'endort de son dernier sommeil alors que l'agent pathogène continue à étendre sa domination sur la planète, exterminant toute forme de vie. 

 Juillet 2020 

mercredi 24 février 2021

La sorcière des Bell

   Un couinement fait sursauter l'homme qui regarde autour de lui. La mer de maïs semble vouloir le noyer mais il baisse les yeux à terre à la recherche de l'intrus. Enfin il l'aperçoit, un gros chien le regarde venir à lui, immobile. Plus il s'approche, plus il se dit que ce chien ne ressemble pas à chien. Il hésite un instant, puis il épaule son fusil, la balle part, déchirant l'air de l'après-midi et il se précipite. La place est vide, nul cadavre, nulle trace de pattes. Perplexe, l'homme rentre chez lui à pas lents.
  Les jours passent et l'homme oublie l'incident. Il joue à la balle avec ses fils lorsqu'un oiseau perché en haut d'un arbre l'intrigue, il s'approche et l'oiseau inconnu ne bouge pas. Avec précaution, le riche fermier épaule son fusil avant de se précipiter au pied de l'arbre.
- Vide, l'oiseau s'est envolé! 
Il hausse les épaules et il rejoint ses enfants.

- J'ai vu une fille de mon âge en train de se balancer à la grosse branche.
- Quelle fille, Betsy? s'étonne le fermier en fronçant les sourcils.
- J'ai essayé de lui parler mais elle ne m'a pas répondu. Elle avait mon âge et portait une robe verte mais je ne l'ai jamais vue dans les environs.
- Où est-elle maintenant?
- Elle a disparu quand je me suis approchée, je ne sais pas où elle est maintenant.
- Comme le chien que j'ai vu.
Le fermier se tourne vers l'esclave qui vient d'entrer et il demande des précisions.
- Un chien noir que j'ai vu plusieurs fois, venu de nulle part. Il grognait et lorsque j'ai pris un bâton pou rle chasser, il a disparu, comme s'il s'était évanoui par magie.
- La magie n'existe pas, retourne au travail.
- Bien monsieur.

-Je ne crois pas à toutes ces histoires! songe l'homme assis sous la véranda sa pipe à la bouche à la nuit tombée. Quelle journée étrange, vraiment. Enfin, tout ceci est terminé. Il est temps d'aller dormir. songe le tennesséen en se levant pour aller dormir.
Cette nuit-là, il rêve qu'un oiseau disparaît sans cesse à l'approche de son fusil et il se réveille à l'aube, en sueur avant de se rendormir paisiblement.

- On a frappé à la porte! Betty, allez ouvrir! dit le maître de maison en prenant son café.
- Il n'y a personne, monsieur. Une farce d'un gamin quelconque, j'imagine.
En fin d'après-midi, une fenêtre claque à l'étage et la petite Betsy se précipite pour la fermer tandis que la porte de la pièce claque. Halentante, elle regarde autour d'elle sans rien remarquer et elle rejoint le rez-de-chaussée. De nouveau, on frappe à la porte et l'enfant se précipite pour ouvrir, trop heureuse de se retrouver face à un être humain quelconque mais de nouveau, le perron est vide.
- J'ai rêvé, voilà tout.
Durant la nuit, la maisonnée se réveille au son de griffes qui raclent le plancher du grenier. Le maître de maison et deux esclaves se rendent au dernier étage de la maison sans rien trouver, ni marques, ni trace de rats ou d'un chien égaré. Alors qu'ils redescendent, une fenêtre claque à l'étage et ils se rendent dans la salle de bain mais la fenêtre est fermée.
- Allons dormir, nous avons rêvé et nous ne pouvons rien faire de toutes manières. Pas avant demain. dit John, las.
Le lendemain matin alors que la famille prend le petit-déjeuner, une porte claque à l'étage mais personne ne se lève. En effet, au dehors, les grognements de deux chiens qui se battent les attirent dans la cour mais elle se révèle vide.
- Terminons de manger, le travail nous attend. décrète le maître de maison d'une voix ferme. Ces manifestations cesseront d'elles-mêmes si nous les ignorons.
Pour lui répondre, la fenêtre se met à battre fortement mais sans se laisser démonter, il la referme avant de se rasseoir devant son petit-déjeuner suivi par sa famille.
- J'ai du travail. dit-il en se dirigeant vers les champs, soulagé d'échapper aux manifestations et de pouvoir réfléchir à son aise mais inquiet de laisser sa famille dans la maison. Lorsqu'il rentre le soir venu, il s'enquiert de la situation.
- Mon maître, les bruits n'ont pas cessé de la journée, pire il y a eu des gargouillis dans les tuyaux. J'ai eu la peur de ma vie mais j'ai fait mon possible pour n'en rien montrer. dit la vieille esclave en espérant qu'il aura une réponse.
- Ignorons ces bruits et bientôt, plus rien n'y paraitra. L'auteur de cette farce finira par se lasser.
- Je l'espère.
A minuit, un bruit de chaînes parcourt la maison entière et la maisonnée se réunit dans le salon, incapable de dormir. Ce n'est qu'à l'aube que monsieur Bell décrète qu'il est temps d'aller dormir tandis qu'au dehors, deux chiens se battent en hurlant.

Après une nuit paisible, la famille se réunit autour de la table du petit-déjeuner.
- Nous devons garder le secret sur tout ceci, on pourrait nous accuser de sorcellerie et nous condamner au bûcher. Avec le temps et de la patience, les choses s'apaiseront d'elle-même. décrète le père de famille d'un ton qu'il veut assuré.
Les enfants acquiescent et mangent en silence avant de se rendre à l'école où ils ne soufflent mot de l'histoire. Restée seule dans la maison, Betty ne cesse de regarder autour d'elle mais en voyant que tout est calme, elle se met à la lessive en chantonnant comme elle a l'habitude de le faire. Elle a les mains plongées dans le savon lorsqu'un grattement la fait lever la tête. Bientôt le bruit reprend et elle identifie de nouveau, le bruit de griffes raclant le sol. Elle sent son visage blêmir et elle décide d'affronter le fantôme. Avec courage, elle se rend dans la pièce au-dessus de sa tête mais son inspection ne révèle rien.
- Qui est-là? J'ai entendu du bruit. dit-elle d'une voix aussi assurée que possible mais seul le silence lui répond.
Elle inspecte la pièce dans l'espoir de trouver un rat mais tout est vide et elle redescend précipitamment finir sa lessive.
Elle sursaute alors qu'elle se penche pour prendre la bassine pleine de linge humide au son d'une porte qui claque mais la porte de la buanderie est grande ouverte. Elle sort dans le jardin pour étendre le linge avec la sensation d'être observée mais elle tient bon et fait mine de ne rien remarquer dans l'espoir que de nouvelles manifestations n'apparaissent pas. Alors qu'elle rentre dans la maison, elle entend un bruit de quelqu'un qui s'étouffe et elle se précipite dans la salle à manger qui est vide.
Terrifiée, la jeune femme hésite et elle sort dans le jardin pour reprendre ses esprits.
- Je dois rester forte pour le maître et sa famille. A quoi bon me plaindre? Nous sommes tous dans les mêmes tourments.
Avec résignation, elle reprend sa lessive qu'elle achève rapidement avant de mettre le linge à sécher, soulagée d'être à l'extérieur.

Le soir venu, la famille est réunie et évoque sa journée. Soudain, le bruit de pierres qui tombent sur le plancher les fait sursauter mais le regard impérieux du chef de famille les fait baisser le nez dans leur assiette et continuer à manger comme si de rien n'était.

- Cette nuit, j'ai entendu des bruits comme si des rats rongeaient les montants de mon lit. dit la jeune Betsy le lendemain matin mais il n'y avait rien. Je suis restée roulée en boule dans mon lit toute la nuit, terrifiée.
- Hier, j'en entendu quelqu'un s'étouffer alors que je rangeais du bois dans la soupente. dit le fermier. Nous devons nous efforcer de vivre normalement comme si de rien n'était.
Une semaine plus tard, le jeune fils hurle dans la nuit précipitant la famille dans sa chambre. L'enfant en larmes est assis sur son lit et ses couvertures gisent au sol.
- Que se passe-t'il? interroge le fermier.
- Je dormais et mes couvertures ont été arrachées de mon lit. sanglote l'enfant.

- Ce n'est rien. dit son père en l'attirant contre sa poitrine où l'enfant se laisser bercer. Peu à peu, ses larmes se tarissent et John Bell se sent soulagé.K
- Ce n'est rien, les choses vont finir par s'apaiser, Dieu nous protège et ne permettrait jamais que le Diable nous tourmente alors que nous sommes bon chrétiens.

Les jours suivants, tous les membres du foyer voient leurs couvertures arrachées et plusieurs se plaignent d'avoir reçu des claques pour s'être opposé à l'entité. Betsy se rend compte qu'elle est la plus grande victime de tous, elle se plaint de voir ses cheveux tirés avec force tandis que les autres se plaignent de simples tirements de cheveux. A part elle, elle se demande ce qu'elle a bien pu faire pour mériter ce traitement mais elle n'ose pas poser la question à voix haute dans la solitude de sa chambre. Le soir venu, elle prie longuement Dieu dans l'espoir qu'il la protège mais nul ne lui répond et elle se couche, tremblante entre ses couvertures sanglotantes attendant que l'entité s'en prenne à elle. Lorsqu'elle sent ses cheveux tirés par une force invisible, elle font en larmes, incapable de se défendre face à l'ennemi qui l'assaille sans raison.
- Que t'ai-je fait? demande la fillette, sanglotante.
Mais nul ne lui répond et elle se recroqueville sur elle-même, inconsolable n'attendant que le matin.

Quelques jours plus tard, la jeune fille croise Richard Powell, maître d'école qui lui demande de ses nouvelles avec affabilité. Elle observe l'homme bien consciente qu'il lui fait la cour et elle lui répond poliment avant de reprendre sa route.
L'homme se retourne sur son passage en souriant.
- La fille d'un des plus riches fermiers des environs serait un beau parti. se dit l'instituteur en reprenant sa route, songeur. Mais je suis bien plus vieux qu'elle...
Alors qu'elle arrive en vue de la ferme, la jeune fille se trouve face à Joshua Garner.
- Bonjour, monsieur Garner.
- Bonjour, Betsy. Puis-je venir vous rendre visite à l'occasion?
- Bien sûr. dit-elle à son voisin qui lui répond en souriant.
Joshua Garner sourit et il lui promet de venir rendre visite à la famille de la jeune fille.
Ravie, la jeune fille rentre en rêvassant à son prétendant.

Quelques jours plus tard, Joshua arrive à la ferme et il fait une longue promenade avec Betsy qui semble apprécier sa compagnie.
Au fil des jours, Betsy se rend compte que les visites de monsieur Garner se soldent par un regain d'activité de ce que l'on appelle dans les environs la sorcière des Bell.
- Elle n'aime pas cet homme. songe la jeune fermière en larmes.
Pourtant, elle relève la tête et elle fait bonne figure à son visiteur qui vient le voir de plus en plus souvent à son grand plaisir.
Pourtant, elle doit bien se rendre l'évidence que chaque visite donne lieu à des représailles. Elle en parle à ses parents mais comme personne ne sait ce qu'il se passe, elle décide de faire son choix seule et elle continue à fréquenter son prétendant.
Au fil des jours, les attaques se multiplient et un soir, sa famille se réunit autour d'elle alors qu'elle raccomode une robe dans le salon.
- Tu vas partir, nous nous inquiétons tous pour toi. dit son père.
- Mais, où vais-je aller?
- Prépare tes affaire et fais-moi confiance. dit le fermier.
L'adolescente comprend qu'il ne tient pas à dévoiler à haute voix le lieu de sa retraite à l'entité et elle obtempère soulagée de quitter les lieux mais attristée de quitter sa famille. Elle verse une larme lors de ses au revoir et elle monte dans la carriole, le cœur lourd en ravalant ses larmes, pleine d'espoir.
Durant le trajet nul ne dit un mot et Betsy se détend lorsqu'elle reconnaît la ferme d'amis de ses parents qui ont toujours été bons pour elle.
- Bonjour Betsy. dit le fermier en l'accueillant.
- Bonjour, Jim. dit-elle en se forçant à sourire.
Tandis que la femme de Jim l'installe dans sa nouvelle chambre, elle entend des bribes de voix et elle devine que son père informe son ami de la tournure des évènements et de la gravité de la situation. Elle se force à ne pas écouter et elle descend bientôt les rejoindre pour mettre fin à la conversation. A son entrée, les deux hommes se taisent et son père se penche pour l'embrasser.
- J'espère que nous trouverons une solution et que tu pourras bientôt rentrer à la maison. dit-il, les yeux embués de larmes.
- Moi aussi, père. J'espère que la chose ne s'en prendra pas à un autre membre de notre foyer. Je me sentirai responsable.
- Tu n'as pas à l'être. la rassure le fermier en mettant la main sur son épaule. A très bientôt. dit l'homme en remettant son chapeau et en sortant pour monter dans la carriole qui le ramènera chez lui.
Sur le chemin du retour, il tente de se convaincre qu'il a fait le bon choix mais il sent l'angoisse le tenailler.

La soirée se passe sans encombre et la jeune fille reprend espoir. Elle se surprend à chantonner alors qu'elle se déshabille et qu'elle se glisse entre les draps. A minuit, elle se réveille incapable de respirer, elle se débat et essaie de crier sans succès. Le souffle court, les joues empourprée, elle parvient enfin à retrouver sa respiration et elle quitte la chambre en pleurs à la recherche d'un miroir qui ne révèle aucune marque sur son cou.
- Je sais pourtant que je n'ai pas rêvé. sanglote-t'elle en rejoignant sa chambre, bien consciente de n'être à l'abri nulle part.
Elle se recouche et elle finit par s'endormir. Le lendemain, elle se tait dans l'espoir que l'entité se lasse face à son indifférence mais lorsqu'elle sent des aiguilles se planter dans la peau de ses bras, ses nerfs la lâchent et elle fond en larmes, confessant ses tourments. Le lendemain, son père vient la chercher et elle remonte dans la carriole, une boule d'angoisse lui nouant le ventre à la pensée de retrouver la ferme familiale. Le fermier s'inquiète de lui voir un visage rouge et il se décide à l'interroger.
- J'ai souvent l'impression d'étouffer, le souffle court. J'ai la sensation qu'on m'étrangle, parfois je sens que je vais m'évanouir mais que pouvez-vous pour apaiser mes tourments?
Son père ne répond rien et la jeune fille se force à lui sourire dans l'espoir de le rassurer.

En larmes, Betsy supplie qu'on la laisse et elle s'effondre en larmes dans l'obscurité de sa chambre.
- Qu'as-tu? lui demande son père au petit-déjeuner.
Il ne peut ignorer les marques sur la peau de la jeune fille et il la regarde avec intensité.
- Je te promets de chercher de l'aide mettre fin à tes tourments.
Sitôt le petit-déjeuner avalé, le père de famille se rend chez son voisin.
- James, je voudrais te parler.
- Bonjour, monsieur Bell.
- Bonjour, madame Jonhson.
- Viens. dit son voisin en l'entraînant dans la cuisine où il lui sert un café fort avant de se servir lui-même.
Après un soupir, John se confie. Il détaille l'année qu'il vient de vivre, les yeux rivés sur le bois de la table dont il suit les veines avec application pour éviter le regard de son voisin.
- Il faudrait des preuves de ce que tu avances. Des informations complémentaires.
- Venez passer quelques temps à la maison avec ton épouse, vous verrez par vous-même, je suis désemparé.
Le couple prépare ses affaires à la hâte et ils suivent leur voisin jusqu'à sa ferme. Après un repas silencieux, la maisonnée va se coucher. A minuit, on cogne à la porte des nouveaux venus et monsieur Johnson ouvre sans trouver le moindre intrus dans le couloir. Perplexe, il retourne se coucher auprès de sa femme terrifiée et il attend la suite des évènements. Au dehors, il entend deux chiens gronder sourdement et il se force à se lever mais il ne voit rien au-dehors. Il commence à se poser des questions lorsqu'il entend des griffes racler le plancher de sa chambre. Il sursaute et terrifié, il se penche sur l'endroit d'où le bruit provient mais le plancher est intact.
- Je t'en prie, rentrons chez nous. sanglote sa femme.
- Non, nous devons les aider et savoir ce qui se passe exactement, je veux voir et entendre par moi-même ce qui se passe ici.
Au matin, forcé de se rendre à l'évidence, il décide de prolonger sa visite. Au bout de quelques jours, il interpelle son voisin et il lui suggère de former un comité pour enquêter et savoir à qui il a affaire. Ils en parlent autour d'eux dans le voisinage et l'histoire fait peu à peu le tour de la région.

- Bonjour, c'est bien ici la ferme des Bell?
- Oui. dit le fermier, en fronçant les sourcils. Que puis-je pour vous?
- Je suis exorciste et j'ai entendu parler de votre histoire. Si vous permettez que je...
Avec un soupir, l'homme acquiesce, lassé et il regarde l'énergumène vêtu comme un cow-boy inspecter la ferme et interroger les habitants. Il observe le vieil homme imposer ses mains sur les murs et lorsqu'il lui dit ne rien pouvoir faire, il se sent presque soulagé. Mais bien conscient que ce n'est que le premier d'une longue série, il hésite sur la marche à suivre, il regarde Betsy qui a pâli sous les mauvais traitements et il décide de laisser leur chance aux démarcheurs dans l'espoir d'avoir des réponses même s'il n'y croit guère. Au fil des semaines, le défilé se poursuit sans résultat et John Bell s'interroge sur le bien-fondé de sa décision d'autant plus qu'il ne voit aucune amélioration du sort de sa fille.
- Au moins, ils ne me demandent pas de les payer. bougonne-t'il en examinant ses champs.

- Répondez à ma question, un coup pour oui et deux coups pour non.
Dans la chambre de Betsy, le medium reste à l'écoute de l'entité qui répond par des coups sans lui apporter de réelles réponses sur sa nature et son but. Navré, il rejoint la famille qui attend au salon, tout en évoquant des résultats encourageants.
Ses confrères se suivent et bientôt l'entité siffle pour répondre aux questions des medium sans se faire menaçante, les encourageant à continuer. Le fermier et la jeune fille écoutent les rapports et ils décident de continuer leurs démarches dans l'espoir d'avoir une réponse à leurs interrogations.
- Mon Dieu! s'écrie le medium en se levant de sa chaise. Je l'ai!
Il se penche et il tente de décrypter les mots que la voix vient de lui dire mais il ne parvient pas à reconnaître le message et la nature de l'entité même s'il juge le résultat encourageant.
- J'ai réussi à entrer en contact avec l'entité. Elle a parlé, je n'ai pas compris ce qu'elle a dit mais c'est une avancée. Nous pouvons espérer savoir ce qu'elle veut à votre fille et la faire partir de chez vous. Je reviendrai dans quelques jours, si vous l'acceptez.
- Je l'accepte. dit le père de la jeune fille qui n'a pas de meilleure piste.

- Bien, allons-y.
De nouveau, le medium tente d'entrer en communication avec la voix seul dans la pièce en essayant de ne pas penser à la famille terrifiée qui attend dans le salon. Il regarde la chambre de la jeune fille et il laisse son esprit s'ouvrir à son environnement. De nouveau, il interroge l'entité dans l'espoir d'avoir une réponse qui l'aide à porter assistance à la famille. Il interroge de nouveau l'entité sur son origine et sur son but en vain. Découragé, il songe à quitter les lieux lorsque la voix se fait entendre, claire et nette mais saccadée.
- Je suis un esprit venu de partout, ciel, enfer et terre. Je suis dans l'air, dans les maisons, en tous lieux, tout le temps, née il y a des millions d'années. C'est la seule chose que je vous dirai.
Perplexe, le medium rejoint la famille qui a entendu le discours de l'entité et Betsy fond en larmes tandis qu'il tente de rester rassurant.

Au fil des jours, le comportement de l'entité changea de nouveau. Un jour en rentrant de la messe, la famille eut la surprise d'entendre la voix répéter mot pour mot le sermon qui venait d'être prononcé par les deux pasteurs qui officiaient dans la paroisse.
- Mon dieu, quand cela s'arrêtera-t'il? s'interroge le fermier.
Lassée de son manège, l'entité se mit à dire des obscénités qui horrifient les prudes fermiers. Elle ne manquait pas de leur chuchoter à l'oreille ses paroles à n'importe quel moment de la journée. Avec soulagement, Betsy remarque que leur agresseur s'attaque à leur famille dans son ensemble mais bientôt, l'entité s'acharne sur sa mère, Lucy, accroissant son sentiment de culpabilité. L'entité chuchotait à son oreille à toute heure de la journée sans jamais lui faire de mal directement à son grand soulagement. Bientôt, l'entité s'attaqua à John Bell qui craignait que toute la famille soit concernée au fil du temps, culpabilisant de ne pouvoir les aider.
Un soir que des voisins s'étaient réunis dans la cuisine de la ferme pour partager une bouteille de bière, la voix de la sorcière se fait entendre "Je suis déterminée à hanter et faire souffrir le vieux Jack tout au long de sa vie".
John Bell reconnaît là son surnom et il frissonne même s'il espère que l'entité cessera de tourmenter les autres membres de sa famille pour s'acharner sur lui. Horrifiés, les voisins ne disent rien, se bornant à regarder le fermier avec compassion.
- La sorcière des Bell a encore frappé. dit l'un d'eux avec résignation en quittant la ferme, triste d'abandonner la famille dans ses tourments mais bien conscient de son impuissance.

- Je ne remarque rien d'étrange. dit le médecin de la famille, perplexe. Et si Betsy était ventriloque? Même sans s'en rendre compte, dans un état second, durant une absence? Je repasserai dans quelques jours.
Les visites s'enchaînent mais le médecin s'avoue impuissant jusqu'au jour où la voix se met à parler et qu'il place précipitamment la main sur la bouche de la jeune fille.
- Au moins, nous savons que Betsy n'est pas ventriloque... dit l'homme en se grattant la tête, perplexe. Je ne trouve aucune explication rationnelle pour le moment.

Un matin, le fermier se réveille avec la sensation d'étouffer. Sa bouche le fait souffrir et le miroir lui renvoit l'image d'une langue gonflée qu'il tâte pour déterminer la cause d'un tel changement. Son reflet déformé lui fait craindre le pire et il décide de ne pas appeler le médecin dans un premier temps.
- On dirait que je me suis fait piquer par une guêpe mais il n'en est rien. se dit-il en descendant jusqu'à la cuisine pour prendre son petit-déjeuner.
L'horreur se lit sur les visages lorsqu'il prend place autour de la table et il sourit faiblement.
- Je ne sais pas ce qui se passe, je ne crois pas être malade, l'entité... dit-il avec difficulté avant de servir en lait et en pain beurré, se forçant a avaler la nourriture malgré ses difficultés.
Alors qu'il se met au travail, une voix l'assaille de grossiéretés qu'il feint d'ignorer. Tout au long de la journée, il se contient mais une fois couché dans son lit, les larmes l'assaillent dans la chambre silencieuse.
Au matin, toute trace de l'enflure a disparu même s'il continue à être la proie des injures de la créature et qu'il continue son travail comme à l'accoutumée. Pourtant après une nuit agitée, il se rend à l'évidence après quelques jours d'apaisement, l'enflure marque de nouveau son visage et il s'examine avec horreur. Au fil des jours, la situation se dégrade et il se voit contraint de cesser son travail et de rester dans la maison incapable de soutenir la moindre activité.

Le fermier entre dans la porcherie et il souflle.
- Je reste épuisé par la dernière crise. se dit-il en se tournant vers son fils cadet qui lui sourit. Nous allons faire un sort à la truie, nous aurons de la viande pour cet hiver.
John s'arrête, les yeux baissés et il secoue la tête.
- Ce n'est rien, j'ai perdu ma chaussure. songe-t'il avec soulagement en se baissant pour le renouer.
Il reprend sa route lorsque l'autre chaussure reste dans la poussière de la cour. Les sourcils froncés, il revient en arrière et il refait son lacet avec application pour s'assurer que la chaussure ne le quittera pas de nouveau. Il reprend sa route, rejoint par son fils mais de nouveau, il perd un soulier.
- Je ne comprend pas, cette paire de chaussure est étroite, je peine à les mettre! dit-il en renouant de nouveau ses lacets.
Sans un mot sur l'incident, feignant de l'ignorer les deux hommes s'occupent des cochons en silence. Leur tâche accomplie, ils retournent vers la ferme mais de nouveau, John perd son soulier à plusieurs reprises, renouant les lacets avec application à chaque fois.

En vue de la ferme, père et fils se regardent, soulagés de retrouver leur abri précaire.
- Ah!
Le fils se précipite vers son père qui se tient le visage, plié en deux.
- Il étouffe. se dit-il en l'aidant à s'asseoir sur un rondin, le souffle court.
- J'ai été frappé. dit le fermier en grimaçant.
- Nous allons rentrer et tout se passera bien. tente de le rassurer le jeune garçon tandis que le visage de son père commence à se contracter pour se convulser bientôt suivi de son corps tout entier.
- Richard, je...
- Père. dit-il ne sachant que faire, se contentant de tenir la main de son père.
En son for intérieur, il craint qu'il ne meurt mais il se retient de prononcer ses craintes à voix haute, attendant avec angoisse la fin de la crise. Des chants se font entendre sans qu'ils puissent en distinguer les paroles mais le ton empli de moqueries ne fait aucun doute et il se bouche les oreilles alors que le volume du chant ne cesse d'augmenter. Un éclat de rire signe la fin des chants et le jeune homme soupire de soulagement. Il reporte ses regards sur son père dont le visage continue à se convulser et il se retient d'essuyer les larmes qui inondent ses joues.

En pleurs, le fermier s'adresse à son fils.
- Mon fils, je ne tarderait pas à quitter ce monde. Je ne pourrais survivre bien longtemps aux persécutions que cette chose horrible m'inflige. Elle m'assassine à petit feu, je sais que la mort approche.
Le jeune garçon sanglote et il aide son père à se relever pour le ramener dans la ferme. La famille note leur mine triste mais personne ne pose de questions et le jeune garçon aide son père à rejoindre sa chambre et à se coucher. Au fil des jours, le fermier sent ses forces le quitter, incapable de quitter son lit. Les semaines passent, n'apportant pas d'amélioration et la famille se désole.

- Mon dieu!
La famille se précipite dans la chambre du malade au cri de la mère de famille et ils trouvent leur père secoué par les convulsions et inconscient tressautant sur son lit sans qu'ils puissent faire quoi que ce soit.
En désespoire de cause, l'un des fils s'attarde sur la table pleine de flacons de verre contenant des médicaments à la recherche d'un remède, pris d'un sentiment d'urgence.
- Qu'est-ce que? dit-il en élevant vers la lumière un flacon qui lui est inconnu.
La famille secoue la tête, personne n'a jamais vu ce flacon ni ne sait ce qu'il contient. Le médecin ne tarde pas à arriver et il se penche sur le malade avec inquiétude.
- C'est une perte de temps que de tenter d'aider le vieux Jack. J'ai eu sa peau, cette fois-ci. dit la voix grinçante où le triomphe pointe.
- Et le flacon, que contient-il? demande le fils qui tient toujours la bouteille à la main.
- Une potion que j'ai concoctée et que j'ai fait ingurgiter au vieux Jack cette nuit pour qu'il ait enfin son compte.
La voix se tait et tous frissonnent. La mère de famille s'empart du flacon et elle en donne une goutte à un des chats de la ferme qui se prélasse dans la cour. Sous les yeux horrifiés de tous, il saute en l'air en miaulant de désespoir avant de faire plusieurs tours en apesanteur puis retombe brutalement sur le sol, mort.
- Mon Dieu! Jon a bu ce breuvage par malice, il est condamné. comprend-elle en pleurs avant de revenir au chevet de son mari qui continue à se convulser toute la nuit pour mourir au matin.

Le jour des funérailles, des cris de triomphe emplissent l'église et tous les amis et la famille sursautent tandis que des rires s'élèvent. La voix chante, triomphante et la cérémonie se déroule malgré tout.

Après l'enterrement, la vie reprend son cours et Betsy retrouve Joshua Gardner chaque jour.
- Acceptez-vous de m'épouser cette fois-ci? A la fin de votre période de deuil.
La jeune fille de seize ans hésite et elle regarde son soupirant qui attend sa réponse avec anxiété.
- J'accepte, il faudra que vous en parliez avec ma mère maintenant que mon père n'est plus.
Alors que les préparatifs battent leur plein, Betsy entrevoit un avenir radieux et elle attend chaque jour les visites de son fiancé.
- Par pitié, Betsy, n'épouse pas Joshua Gardner.
La jeune fille se lève d'un bond, se piquant le doigt avec l'aiguille avec laquelle elle raccomodait un chemisier et elle regarde autour d'elle.
- Elle est revenu. songe-t'elle tandis qu'un gémissement s'échappe de sa gorge.
Puis elle se reprend et d'un air de défi, elle se remet à son ouvrage feignant de n'avoir rien entendu et se forçant même à chantonner tant par bravade que pour dompter sa peur.

Désormais à toute heure de la journée, la jeune fille était poursuivie par la voix suppliante de la sorcière et malgré son amour pour son fiancé et sa détermination, elle céda. Un après-midi que son prétendant était venu lui rendre visite, elle le prit à part pour lui parler seul à seule.
- Joshua, je vous aime mais je ne peux pas vous épouser. Je romps nos fiançailles et j'annule notre mariage. La sorcière qui a tourmenté mon père jusqu'à le conduire à la mort et qui m'a tourmentée également est revenue me parler. Elle me supplie de ne pas vous épouser. J'ai peur de subir le même sort que mon père et de vous plonger ainsi que ma famille dans l'affliction. Je vous aime mais je ne peux pas vous épouser. J'espère que vous me comprendrez et que vous me pardonnez. dit-elle les yeux emplis de larmes.
- Vous me brisez le cœur, Betsy mais j'accepte votre décision. Je vous souhaite de trouver le bonheur. dit-il d'une voix brisée avant de se détourner pour rentrer chez lui le cœur lourd.

- Je reviendrai dans sept ans. lance la voix avant de s'évanouir.
Soulagée de ne plus avoir de visites de la sorcière des Bell, Betsy que le maître d'école a commencé à courtiser accepte sa demande en mariage et elle espère de tout son cœur ne pas voir la sorcière surgir le jour de la cérémonie mais à son grand soulagement, tout se déroule à merveille et elle espère un avenir radieux

Sept ans après les évènements, Lucy Bell et deux de ses fils qui habitaient encore dans la maison craignaient le retour de la sorcière comme elle l'avait promis. Le cœur battant, la femme sursaute lorsqu'elle entend des bruits mais à son grand soulagement, rien d'autre ne se passe et elle attend qu'ils cessent.
- John Bell Junior. chuchote la voix dans le noir.
L'héritier des Bell s'éveille, le cœur battant et il se force à répondre.
- Oui?
- Je dois te parler du passé, du futur, de ton père. J'avais mes raisons de le tourmenter mais je puis te dire de quoi il retourne.
L'homme hésite à défendre son père mais il décide de se taire par crainte des représailles, il attend donc la suite de la conversation.
- Je reviendrai dans cent sept ans. dit la voix avant de s'évanouir.
- Mais en mille neuf cent trente-cinq, je ne serai plus de ce monde. songe le jeune garçon qui craint qu'elle ne tourmente ses héritiers.

Quinze ans après l'épisode de la sorcière des Bell qui emporta son père, le bonheur de Betsy se brisa après la mort de son époux.

042020