La petite
fille tire sa luge avec difficulté, ses poumons glacés par
l'air hivernal de ce jour de décembre.
- Je vais
y arriver! s'encourage-t'elle en raffermissant sa prise sur la corde.
Lorsqu'elle
atteint enfin le sommet, elle repousse une mèche de cheveux qui lui
chatouille le front depuis plusieurs minutes et elle lâche le lien
qui la rattache à la pièce de bois peinte qui glisse dans un bruit
feutré. Impuissante, elle la regarde rebondir sur une bosse qui lui
fait craindre le pire. Les dents serrées, elle attend le désastre
mais la luge continue sa course avec vaillance, toujours plus vite.
Soulagée, la petite fille se met à courir dans l'espoir de la
rattrapper. Arrivée en bas de la pente, elle regarde de tous côtés
mais la luge est introuvable.
- La luge
toute neuve que j'ai reçue à noël! Peinte en rouge comme je le
voulais!
Des
yeux, elle suit les traces laissées par la luge et elle se rend
compte qu'elle a dévié après avoir rencontré une bosse. La petite
fille suit les traces, essoufflée par l'air glacé, un peu inquiète
de ne pas voir apparaître la tache colorée qui lui signalerait
l'emplacement de la luge. Lorsqu'elle voit le trou laissé dans un
amas de neige, elle soupire de soulagement. Sans réfléchir, elle
s'engouffre dans le trou mais elle ne voit pas trace de la luge et le
trou se poursuit, tunnel s'enfonçant dans les entrailles glacées.
- Elle ne
peut être bien loin. chuchote-t'elle en avançant peu rassurée par
la lumière déclinant au fur et à mesure de son avancée vers le
fond. Au pire, je traverserai le tas de neige et je ressortirai de
l'autre côté.
Tremblant
de froid, elle s'engouffre dans le tunnel qu'elle suit durant
plusieurs minutes dans une faible lumière. Le tunnel s'élargit et
elle se retrouve dans une immense caverne de glace où trône un
palais de glace finement ciselé.
Ravie, la
fillette entre dans l'édifice et elle s'extasie sur la délicatesse
des pièces qu'elle traverse les unes après les autres, meublées
avec goût de meubles de glace. Elle passe de pièce en pièce en
songeant qu'elle risque de se perdre mais la joie qu'elle ressent
dans cette merveille qui brille comme du cristal la distrait de sa
préoccupation. Une femme vêtue d'une vaporeuse robe abricot
s'avance vers elle en souriant, étincelante sous ses bijoux de
diamant. La petite fille sourit et la joie l'inonde tandis que
la belle femme s'avance vers elle, sourire aux lèvres.
-
Bonjour, je vous attendais.
- Qui
êtes-vous?
- Je suis
la reine des glaces et je suis prisonnière depuis des siècles de
cette caverne enchantée.
-
Pourquoi avez-vous été emprisonnée?
La femme
soupire et sa longue tresse bat ses épaules. Elle lève ses yeux
bleu clair sur l'enfant et elle joue avec une mèche d'or pâle qui
chatouille son front. Puis, elle sourit et chasse la mèche rebelle
avant de tendre la main à la fillette.
- Je suis
prisonnière parce que j'ai commis une erreur mais tu peux me sauver.
-
Comment?
La femme
se penche vers elle et elle lui sourit en l'examinant.
- En
prenant ma place.
La main
chargée de bagues balaie l'air et la petite fille chancelle sous le
coup qui la jette à terre. Son assaillante court vers la sortie, ses
escarpins à la main et la fillette se relève avec maladresse,
transie de froid. A pas lents, elle rejoint la sortie en claquant des
dents mais où qu'elle aille, elle est cernée par les pièces du
château qui lui semblent infinie. Lorsqu'elle revient à son point
de départ après avoir traversé une vingtaine de pièces, elle
comprend qu'elle est perdue.
- Ce
château est ensorcelé ou circulaire ou... Peu importe, je suis
prisonnière.
Les
larmes coulent sur ses joues et ses sanglots se répercutent sur les
voûtes de glace. Mais seul lui répond le silence.