Un matin d'automne, Eglantine-Roselis se réveille en se demandant si
comme elle, l'écrivain vit seul sans congénère. Elle a bien
remarqué que Riagal le chat a des congénères dans le voisinage,
même s'ils ne sont pas toujours amicaux. Elle a remarqué que
l'écrivain ne sort pas souvent de sa maison, il fait parfois le tour
de son jardin mais c'est à peu près tout, même s'il peut
s'absenter plusieurs jours durant. Curieuse, elle se décide à le
suivre un jour de sortie.
Elle le guette et en fin de matinée, il sort. Comme d'habitude, il
sort les bras chargés, puis rentre dans la maison en laissant ses
sacs devant la porte ouverte avant de ressortir. La fée hésite,
elle se demande s'il serait judicieux de se glisser dans un des sacs
qui sont tous vides. L'écrivain pourrait la voir ! Par chance,
il laisse la porte de la voiture ouverte, se gratte la tête et
repart une fois de plus dans l'habitation. Eglantine-Roselis entre
dans la voiture et se glisse sous un siège. Elle se décide à
abandonner son expédition téméraire quand l'écrivain revient, il
avait oublié son manteau.
La porte est rapidement refermée et le véhicule démarre.
Eglantine-Roselis s'était préparée à ce que le véhicule se
déplace par un moyen qui lui est inconnu mais le voir de l'extérieur
et être à l'intérieur sont deux choses bien différentes !
Secouée dans tous les sens, elle s'accroche comme elle peut à la
moquette de l'engin pour tenter de rester en contact avec le sol qui
vibre. La fée voit le manteau qui est tombé sur le sol auprès
d'elle et décide de se glisser dans une poche pour se retrouver à
l'abri. Elle rampe et s'accroche comme elle peut, progresse lentement
sur la moquette vibrante. La fée parvient enfin à se glisser dans
la poche du manteau. Enfin bercée plutôt que secouée par les
vibrations du véhicule, elle commence à apprécier cette
expédition. Le tissu replié sous elle amortit les chocs et quand la
voiture freine brutalement, cette couche moelleuse l'empêche de
glisser jusque sous les pieds du conducteur.
Le véhicule s'immobilise enfin, l'écrivain se retourne et prend la
veste qu'il trouve plus lourde que d'habitude mais il n'en cherche
pas la cause car il est distrait par un coup de klaxon. La veste sous
le bras, il se dirige vers le marché. Eglantine-Roselis malmenée
parvient à se redresser et à se mettre debout. Elle s'accroche au
bord de la poche pour se retenir et jette un œil au dehors. C'est
qu'elle entend du bruit ! Et des odeurs arrivent à son nez !!
Balancée par les mouvements de la marche rapide que l'écrivain a
adopté, elle commence à avoir un peu mal au cœur mais elle tient
bon. Il s'arrête enfin devant un étal où de nombreux légumes dont
certains lui sont inconnus trônent fièrement. A côté, elle
reconnaît quelques fruits : oranges, abricots et pêches
qu'elle a parfois été dévorer la nuit dans les jardins autour de
sa maison. Des concombres aussi, ah et des tomates. L'écrivain donne
quelque chose au marchand qu'elle n'identifie pas et repart.
Il marche d'un pas plus rapide et les jointures des petites mains de
la fée deviennent blanches à force de s'accrocher de toute la force
de ses doigts. L'écrivain s'arrête de nouveau devant un étal et
reproduit le même manège avant de repartir chargé de viande
fraîche certainement destinée en partie à Riagal.
Eglantine-Roselis regarde de tous ses yeux, ravie de ce spectacle.
Jusqu'à ce qu'elle se retrouve à leur point de départ devant la
voiture. L'écrivain plie et jette son manteau dans le panier ;
Eglantine-Roselis glisse de la poche du manteau mais parvient à se
raccrocher à un cordon qui stoppe sa chute. Le cœur battant, elle
finit par retrouver une place confortable dans un repli du vêtement
où elle s'endort bercée par la voiture qui avance sans accroc.
Un coup de frein la réveille, elle entend les portes claquer de
nouveau, le manteau se soulève, elle parvient à se raccrocher à un
cordon au dernier moment et à glisser de nouveau dans une poche.
L'écrivain ouvre la porte, jette le manteau sur un fauteuil et va
dans la cuisine en appelant Riagal qui accourt d'un bond.
Eglantine-Roselis se dépêche de quitter la poche et veut profiter
de l'absence du chat pour quitter la maison. Le fauteuil est haut,
elle ne sait comment descendre... La petite fée fait glisser un
morceau de cordon du manteau aussi bas que possible et glisse le long
de cette corde improvisée le cœur battant avant de se laisser
tomber sur le sol. Elle court vers la sortie qu'elle connaît bien et
rejoint son foyer ravie de cette escapade.