mardi 20 avril 2021

Les moines de Beaulieu

- Vous dites avoir vu des fantômes en ce lieu?

Crayon en main, carnet de notes sur les genoux, l'enquêteur fait démarrer son dictaphone pour ne rien perdre du témoignage.
- Oui, j'étais avec mon fiancé de l'époque. dit la très vieille femme qui lui fait signe. Nous nous sommes assis dans l'herbe non loin de l'abbaye. Nous étions seuls ce qui n'arrivait pas souvent et nous avons commencé à nous dire des mots d'amour avant de nous embrasser. Nous avons été arrachés l'un à l'autre par une force inconnue qui nous a tirés en arrière.
- Vous pensez que c'était une force d'homme?
- Je l'ignore sur le moment, elle m'a semblée surhumaine mais la peur peut déformer les sensations, vous imaginez bien combien nous étions terrorisés.
- Et ensuite? poursuit le journaliste en se perdant dans les yeux délavés de la retraitée qui lui fait face.
- Nous nous tenions par la main alors nous avons tenté de nous rapprocher l'un de l'autre mais cela n'a pas fonctionné. Mon fiancé a été éjecté à cinq ou six mètres de moi. J'ai hurlé de frayeur mais vous imaginez bien que vous avions choisi ce lieu pour ne pas être dérangés. Mon fiancé n'arrivait pas à se dépêtrer de la force qui le maintenait loin de moi. Alors nous avons commencé à nous éloigner de l'abbaye et la force maléfique a relâché son étreinte. Nous avons rejoint notre voiture et nous sommes restés stationnés quelques secondres emplis de la crainte d'avoir été suivi mais nous étions seuls. Nous sommes rentrés sans dire un mot et nous n'en avons plus jamais reparlé. Nous nous sommes séparés un an plus tard et qui sait quel rôle a joué cette rencontre. 
 - Je veux dire qu'après cette expérience, nous n'avons plus vu la vie de la même façon. J'ai eu peur des choses invisibles qui nous entourent. J'ai changé ma manière de voir la vie, il me semble. continue la femme en souriant au journaliste.  

- Merci beaucoup. Vous m'avez aidé à avancer dans mon enquête.

Le cœur serré, il quitte la petite maison avant de remonter dans sa voiture vers son bureau. Dans la pièce éclairée pour une vieille ampoule, il sort une liasse de documents d'un tiroir et il se met au travail. - Donc nous avons la chapelle de Beaulieu utilisée de 1204 à 1538. Ensuite, les gens des environs sont certains que les moines sont restés en ce lieu et ce jusqu'à aujourd'hui; des histoires ont alors commencé à circuler racontées lors des veillées ou de bouche à oreille. Mais les témoignages que j'ai trouvé sont somme toute plutôt récent. dit-il à haute voix pour pousser sa réflexion. Puis, il consulte ses notes" 1943 unité anti-aérienne en mission spéciale. Une nuit, les officiers établissent un plan de campagne sous une tente à proximité de l'abbaye. Un souffle fort se répand dans le campement. On pense à une tornade, c'est l'été et il n'y avait pas de vent. Quelques hommes sortent à l'extérieur de la tente: les feuilles des arbres volent, leurs branches s'agitent mais ils ne ressentent aucun souffe de vent sur leur peau. Peu après, quelques moines quittent la chapelle alors qu'il n'y a normalement personne. Le colonel les hèle mais ils ne réagissent pas et ne répondent pas. Un capitaine court alors vers eux pour leur parler mais il les traverse. Tous sont convaincus d'avoir affaire à des spectres même si personne dans leur groupe n'y croit. Ils sont en train d'évoquer un mirage même si les conditions ne sont pas réunies mais cela leur semble la seule explication plausible, lorsqu'un des moines quitte le groupe et se dirige vers eux. Il leur semble que c'est le père supérieur et il s'arrête juste à côté d'eux. - Une attaque aérienne va avoir lieu dans la région. dit-il. Il s'évanouit et ils se retrouvent seuls. Quarante-huit heures plus tard, des avions appartenant à la Luftwaffe survolent les lieux. "

"1951, peu avant noël, Mickael Sedgwick, directeur de recherches au musée de l'automobile de l'abbaye de Beaulieu travaille dans son bureau. Ce n'est pas inhabituel, il travaille souvent de nuit en enchaînant les cigarettes. Il ouvre la fenêtre afin de chasser la fumée et il entend des chants religieux. Il tend l'oreille et il reconnaît des chants catholiques non loin de l'endroit où il se trouve. Une musique douce, des voix mélodieuses lui arrivent avec irrégularités. Il cherche à les capter sur son poste de radio pour mieux entendre mais il ne trouve pas les chants qu'il recherche. Il comprend alors qu'il entend des chanteurs bien réels. Ce soir-là, l'intendante de l'abbaye, Bertha Day qui se trouve à deux kilomètres entend également les chants. Elle se dit qu'ils sont chantés pour le repos de l'âme de sa voisine, madame Mearse qui vient de trépasser. Elle finit par apprendre que le corps a déjà été enlevé et qu'il ne peut donc s'agir de chants funèbres. Alertée, la police cherche à retrouver les squatteurs mais ils ne trouvent ni moine ni squatteur dans le bâtiment. Le révérent père Robert Fraser Powles leur apprend alors qu'il sait que des fantômes de moines habitent l'endroit. Il dit avoir de bonnes relations avec eux, connaître le nom de plusieurs d'entre eux et même en tutoyer. Ces hommes sont morts au début du XVIème siècle et ils reviennent célébrer une messe chaque noël dans l'église du village.

Un fidèle a vent de ces propos et lui fait remarquer que peu de monde se rend à la messe de minuit. Le révrend en ce 24 décembre 1958, lui répond "Il y en a beaucoup plus que vous ne voyez!" Immédiatement, des choeurs se mettent à chanter dans l'église.

En 1965,l'actrice Margaret Rutherford se promène dans la région lorsqu'elle rencontre un moine vêtu d'une robe marron qui lit dans le cloître en ruines, appuyé contre un mur. Elle hèle un paysan qui travaille dans son champ juste à côté et elle photographie l'homme d'église qui n'apparaît pas sur les photographies une fois celles-ci développées.

Puis en 1979, les moines refont surface. Un témoin dit avoir vu un moine tailler la vigne qui venait d'être replantée peu avant.

17 11 2020