mardi 4 avril 2017

Les contes flamboyants de la forêt: L'arbre du monde

  Dans l’antiquité, il existait un arbre qui avait la réputation d’être l’arbre du monde, ses racines étaient ancrées si loin dans la terre qu’elles traversaient la planète de part en part. Ses branches montaient si haut vers le ciel qu’on disait que lorsque le vent le faisait chanter durant les nuits de tempête, il répétait les secrets des dieux.

   Le peuple vivait à son rythme. L’arbre voyait-il ses feuilles dorer puis rougir ? L’automne arrivait, les dieux se préparaient au repos. Lorsqu’il se dépouillait, les hommes croyaient que la terre était en sommeil, elle rêvait pour mieux renaître à la vie, les dieux eux-mêmes se reposaient de leur dur labeur. Le printemps arrivait, l’arbre se couvrait de bourgeons puis de fleurs odorantes et les dieux étaient en bonne santé, ils fêtaient leur renaissance. L’été marquait l’apogée de leur puissance, l’arbre arborait des feuilles vertes et vigoureuses.

  Un jour, l’arbre ne reverdit pas. Malade ou âgé, le printemps sembla sans effet sur lui. Le peuple s’inquiéta mais le soleil et les fleurs revinrent alentour et les habitants du lieu se rassurèrent. Esseulé et oublié, l’arbre demeurait en sommeil. En quelques mois, les hommes oublièrent qu’il avait la réputation d’être l’arbre du monde, l’arbre dont les racines plongeaient si loin dans la terre qu’il sentait les évènements bien avant leur arrivée. Si les hommes l’avaient observé avec attention, ils auraient remarqué que l’arbre semblait en bonne santé et que seules ses feuilles n’avaient pas réapparu.

  Une nuée de sauterelles s’abattit sur les champs, les arbres et l’herbe. En une nuit, elles dévorèrent toute la verdure avant de rejoindre de nouvelles contrées. Les hommes étaient désespérés, la végétation avait laissé place au bois et à la pierre.

  Lentement, l’arbre du monde reverdit, ses bourgeons apparurent et ses feuilles se déployèrent procurant ombre et fraîcheur, les insectes virent se nicher dans ses branches, les oiseaux revinrent apportant des graines nouvelles. Peu à peu, la vallée revint à la vie.

   L’arbre du monde fut de nouveau vénéré et depuis ce jour, les hommes guettent le jour où ses bourgeons ne renaitront pas au début du printemps, signe qu’ils doivent se préparer au pire.