lundi 19 décembre 2016

Fatale erreur de sac

Le train entre enfin en gare, lentement, en crachant un panache de fumée qui volette délicatement dans l'air. Je sais que les trains d'aujourd'hui ne crachent plus de fumée mais on peut rêver...donc c'est fait exprès. Je rêvasse, je rêvasse mais je vais rater mon arrêt ! Je cours après avoir attrapé mon sac et je prends mon bus. C'était le dernier, j'ai eu de la chance, je l'aurais manqué si le train avait eu du retard et rentrer à pied dans le froid glacial de décembre n'est pas une idée plaisante.

Je trouve à m'asseoir et j'ouvre mon sac pour prendre mon baladeur. Mais ce n'est pas mon sac, sur le revers du cuir un prénom est noté au stylo indélébile : Gorgonie. Avec un prénom pareil, elle ne sera pas dure à retrouver ! Heureusement, j'ai le minimum dans mes poches : clés, porte-monnaie et téléphone portable, même si cette erreur m'agace.

Enfin rentrée chez moi, tandis que je réchauffe un plat préparé au micro-ondes, j'ouvre le sac en me disant que je trouverai peut-être les coordonnées de cette Gorgonie. Je trouve un pistolet en matière plastique, en tous cas il est léger ; un carnet avec des notes illisibles et un plan de banque apparemment. Je décide d'appeler la police immédiatement, les policiers sont difficiles à convaincre mais ils finissent par venir.
- C'est Gorgonie, la célèbre tueuse à gages ! Merci beaucoup mademoiselle....

Ce n'est que deux heures plus tard quand on sonne à la porte que je me dis que je n'ai pas été prudente et que j'aurais dû demander une protection aux policiers.
- Ouvre ou je fais sauter la serrure !
Tremblante, j'obtempère, on ne sait jamais un éclat pourrait me blesser et coopérer est la meilleure option car elle finira par entrer de toutes manières.
- Bonjour, que puis-je pour vous ?
- Mon sac !
- Je l'ai donné à des policiers en patrouille dans le quartier, j'ai jugé cela plus sage. Il y a un problème ?
- Rien que pour ça, tu mériterais que je te fasse la peau ! Tu me fais à manger et tu me trouves des vêtements propres ?
- Euh... Oui.

Je n'ai guère le choix et j'obéis. Je suis dans de sales draps, c'est sûr et certain. J'observe la femme qui s'est affalée sur mon canapé et qui zappe pour trouver une chaîne d'information. On sonne à la porte, c'est un policier qui a retrouvé ma carte de bus au fond du sac.
- Oh, bonjour, cher voisin, comment allez-vous ?, je glousse de rire pour tranquilliser mon « invitée » avant de mimer un mot silencieux : « Gor-go-nie ». Le policier comprend et entre tandis que je referme la porte.
- Au revoir, Monsieur ! Ah oui, n'oubliez pas de me donner vos clés avant de partir en vacances pour que je vienne nourrir votre chat ! Oui, bon week-end.
J'ai les mains moites, des sueurs froides alors que je referme la porte. Le mur fait un angle et j'ai une épaisse moquette, le policier a dû s'approcher suffisamment près du canapé .

- GORGONIE, VOUS METTEZ LES MAINS EN L'AIR ET AU MOINDRE MOUVEMENT, JE VOUS TROUE LA PEAU. Compris ?
- Tu m'as dénoncée, espèce de
- Non, c'est un voisin qui vous a vu par l'oeil-de-boeuf, vous savez ce que c'est les petits vieux, ça s'ennuie et ça s'occupe des affaires du voisinage. Je demande des renforts au 14 rue V..., deuxième étage, appartement 10. J'ai Gorgonie, la tueuse à gages en ligne de mire, faites vite.