Ce matin, à mon
réveil, je me levais comme d'ordinaire : en retard ! Je
courais après mon bus, une tartine à la main après une douche
rapide. Bien évidemment, le bus ne s'arrêta pas et j'ai dû
attendre le suivant en trépignant d'impatience. Un homme lisait le
journal sur le banc de l'arrêt de bus sans faire attention à moi.
Mon ventre gargouillait mais je l'ignorais. Le bus suivant arriva
enfin et je montais derrière le monsieur au journal. Debout dans un
coin, j'écoutais de la musique et descendis à mon arrêt.
Je rejoignais mon
bureau le plus discrètement possible non sans avoir pris le temps
d'aller aux toilettes. En retard pour en retard, je n'étais plus à
cinq minutes près. Personne ne fit attention à moi, le dos
contracté, j'attendais une remarque mais rien ne vint. Je
m'enfermais dans mon bureau et n'en ressortais qu'à midi, soulagé
que ce retard soit passé inaperçu.
J'allais acheter un
sandwich, personne ne fit attention à moi sauf le jeune stagiaire
qui me servit en souriant. Courant presque, je rejoignis mon bureau
où personne ne fit attention à moi. Je n'avais pas mangé ce
matin-là donc je pris mon temps pour déguster ce repas bienvenu.
L'après-midi se
passa de même, personne ne répondit à mon « A demain! »,
machinal en quittant le bureau. En rentrant chez moi, je fis un grand
sourire à Solange, la petite vieille du cinquième que j'adore avec
Cacahuète son imbécile de chien que je déteste mais qui
étrangement m'ignora également. Je trouvais cela plus étrange que
tout le reste, mais je haussais les épaules.
Le lendemain, mon
patron vint me dire bonjour en me disant que j'avais bien travaillé
hier mais qu'il trouvait étrange qu'on ne se soit pas croisés de la
journée. Je le remerciais machinalement mais je ne comprenais pas.
Il avait, à son habitude, passé son temps à passer de bureau en
bureau, il m'avait forcément vu ! Solange bis la standardiste
me fit la réflexion qu'elle ne m'a pas vue hier et me croyait
malade. Par contre, Kevin dans le bureau à côté du mien me
répondit que oui, oui, on s'est dit bonjour hier, je n'avais pas
oublié.
Je posais mes
affaires sans comprendre. La journée se passa sans que je n'y
comprenne rien. On était vendredi, je me couchais à quatre heures
du matin, épuisé. C'est dans mon sommeil que je trouvais la
réponse : les gens que j'ignorais d'ordinaire, à qui je disais
bonjour machinalement sans vraiment les regarder ou leur adresser un
vrai bonjour. C'était le dénominateur commun ! Je me promis de
faire plus attention dès lundi, un simple sourire et un vrai bonjour
peut tout changer.